Bail civil (Code civil) : mode d’emploi et points de vigilance

Le bail civil (ou bail de droit commun) est un contrat régi par le Code civil. Il offre une très grande liberté contractuelle : durée, loyer, préavis, charges, garanties… tout est négociable. Ce bail est utilisé pour :

  • une résidence secondaire,
  • un logement de fonction mis à disposition d’un salarié,
  • des locaux loués à des associations,
  • des parkings ou garages indépendants, bureaux, entrepôts, locaux non ouverts au public,
  • certaines locations saisonnières hors régimes particuliers.

Il ne peut jamais être utilisé pour loger une résidence principale : dans ce cas, la loi du 6 juillet 1989 s’applique automatiquement. De même, s’il s’agit d’une activité commerciale ou libérale, un bail commercial ou professionnel s’impose. Le risque majeur est donc la requalification avec toutes ses conséquences juridiques.

Définition et fondements juridiques

Le bail civil repose sur les articles 1713 à 1778 du Code civil :

  • Art. 1713 s. : liberté pour fixer les conditions du bail.
  • Art. 1719 s. : obligations du bailleur (jouissance paisible, entretien, réparations majeures).
  • Art. 1728 s. : obligations du preneur (loyer, réparations locatives, usage conforme).
  • Art. 1736 s. : fin du bail et usages en l’absence de clauses.

Le bail civil se distingue :

  • du bail d’habitation loi de 1989 (résidence principale : durées obligatoires, congé motivé, cadre strict),
  • du bail mobilité (1–10 mois, public éligible, pas de dépôt de garantie),
  • du bail professionnel (professions libérales),
  • du bail commercial (fonds de commerce, accueil de clientèle).

Pour sécuriser le bail civil, il faut définir clairement la destination des lieux et exclure expressément la loi de 1989 lorsque pertinente.

Cas d’usage autorisés

Résidence secondaire

Bail civil parfaitement adapté si le logement n’est pas la résidence principale. Mention explicite à ajouter dans le contrat.

Logement de fonction

Utilisé lorsqu’une entreprise loge un salarié. Inclure : clause “logement de fonction”, occupant nominatif, exclusion loi 1989.

Associations

Possible pour des locaux associatifs sans activité commerciale ni accueil du public. Préciser l’activité autorisée.

Parkings / garages

Usage idéal : unité autonome, bail simple.

Bureaux, entrepôts, locaux non destinés à accueillir du public

Adapté pour usages internes non commerciaux. Attention : si clientèle ou activité libérale → bail commercial/professionnel requis.

Location saisonnière

Admis hors régimes spécifiques, mais respecter les règles locales (déclaration, changement d’usage…)

Cas d’usage interdits ou risqués

  • Résidence principale : strictement interdit → application automatique de la loi de 1989.
  • Activités commerciales ou libérales : bail civil inadapté → requalification.
  • Meublés touristiques réglementés : nécessitent déclaration/autorisation selon les villes.

Bon réflexe : décrire précisément l’usage, l’identité des occupants, l’exclusion de la loi 1989 et annexer tout justificatif utile.

Durée, reconduction, résiliation, préavis

Durée

Libre. Souvent 1 à 9 ans. Attention : tout bail > 12 ans doit être notarié et publié.

Reconduction

Uniquement si elle est prévue au bail. Sinon, le contrat prend fin au terme. Définir clairement les modalités.

Résiliation & préavis

Non soumis à la loi 1989 : fixer contractuellement les préavis et la procédure (LRAR, état des lieux, dates d’effet). À défaut → application des usages, source de litiges.

Congé du bailleur

Pas besoin de motif (sauf clause contraire), mais respect du préavis prévu. Surveiller l’usage réel des lieux pour éviter une requalification.

Loyer, charges, indexation

Loyer

Montant totalement libre. Préciser périodicité, mode de paiement et éviter les compléments flous.

Indexation

Une seule clause, claire et annuelle. Choisir l’indice selon l’usage :

  • IRL : résidence secondaire, logement de fonction.
  • ILAT : bureaux, locaux tertiaires.
  • ILC : activités commerciales.
  • ICC : anciennement utilisé pour certains baux pro.

Charges

Deux régimes possibles :

  • Provisions + régularisation : charges détaillées et justificatifs.
  • Forfait : fixe, non régularisable, mais liste précise obligatoire.

Dépôt de garantie, caution et garanties financières

Dépôt de garantie

Aucun plafond légal en bail civil. Indiquer affectation (impayés, dégradations…), justificatifs, délais de restitution.

Cautionnement

Possible. L’acte doit préciser : identité, montant, durée, portée (loyers/charges/frais), plafond éventuel, forme de signature.

Alternatives

  • Garantie bancaire / à première demande : très protectrice mais coûteuse.
  • GLI : souvent inapplicable en bail civil.

Diagnostics & conformité

À remettre selon la nature du bien :

  • DPE
  • ERP (risques)
  • Électricité / gaz si installations +15 ans
  • Plomb (avant 1949)
  • Amiante si applicable

Bien que la loi 1989 ne s’applique pas, le bailleur doit fournir un logement sûr et sain.

État des lieux, inventaire, clés

État des lieux (EDL)

  • entrée et sortie obligatoires en pratique,
  • photos horodatées,
  • tests des équipements.

Inventaire (meublés)

Liste exhaustive du mobilier + grille de vétusté recommandée.

Clés / badges

Inventaire détaillé, interdiction de reproduction sans accord si cylindre sécurisé.

Clauses essentielles à insérer

  • Destination : résidence secondaire, logement de fonction, usage associatif, bureau sans accueil de public…
  • Exclusion de la loi de 1989
  • Durée, reconduction, résiliation, préavis
  • Loyer, indexation, charges, forfaits
  • Dépôt, caution, garanties
  • Réparations et entretien
  • Assurances : MRH + PNO
  • Sous-location / cession
  • Clause résolutoire
  • Copropriété & usage des parties communes

Comparatifs utiles

Bail civil vs bail d’habitation loi 1989

Le bail civil est plus souple (durée, congé, dépôt, indexation). Le bail d’habitation impose un cadre strict et protecteur. Si l’usage réel est une résidence principale → requalification.

Bail civil vs bail mobilité

Le bail mobilité est ultra-encadré (1–10 mois, public éligible, meublé, pas de dépôt). Le bail civil n’a pas ces limites mais ne doit pas être utilisé pour une résidence principale.

Bail civil vs bail professionnel/commercial

Les baux pro/commerciaux ont des droits forts (renouvellement, indemnité d’éviction). Le bail civil n’offre aucune protection de ce type et est réservé aux usages sans accueil de clientèle.

Fiscalité & comptabilité

Nature des revenus

  • Nu : revenus fonciers.
  • Meublé : BIC (LMNP/LMP selon seuils).

Charges déductibles

  • Foncières : intérêts, travaux d’entretien, assurances…
  • BIC : amortissements + intérêts + frais.

Taxes

  • Taxe foncière (TEOM récupérable selon cas)
  • Taxe d’habitation résidence secondaire
  • CFE possible en usage pro

Assurances & responsabilités

PNO + MRH

Recommandées : sécurité juridique pour bailleur & occupant.

Sinistres

Responsabilités selon imputabilité (vétusté/bailleur vs usage/locataire). Prévoir procédure contractuelle.

Risques de requalification & contentieux

Critères

Les juges considèrent l’usage réel : adresse fiscale, présence continue, assurance “résidence principale”, factures, scolarisation, etc.

Conséquences

  • Durées et congés loi 1989
  • Encadrement des loyers
  • Nullité de certaines clauses
  • Restitutions financières

Bonne pratique

Documenter et prouver l’usage non principal : pièces justificatives, clauses, durée cohérente.

FAQ

Peut-on utiliser un bail civil pour un meublé loué à l’année ?

Oui, si ce n’est pas la résidence principale.

Quel indice d’indexation choisir ?

Selon l’usage : IRL (secondaire), ILAT (tertiaire), ILC (commercial).

Dépôt de garantie : montant libre ?

Oui. Mentionner conditions d’imputation et restitution.

GLI / Visale compatibles ?

Souvent non. Préférer caution ou garantie bancaire.

Comment éviter la requalification ?

Clauses claires + preuves d’usage non principal + assurances adaptées.

Diagnostics obligatoires ?

DPE, ERP, gaz/élec selon installations, plomb/amiante selon année.