Une nouvelle loi contre l’occupation illicite des logements plus protectrice pour les bailleurs !

La loi augmentera la protection des propriétaires, triplant, entre autres, les sanctions en cas d’occupation illicite des logements. De nouveaux délits sont créés, notamment pour les locataires restant dans le logement malgré une procédure d’expulsion liée à des loyers impayés.

 

L’Assemblée nationale a voté en deuxième lecture, le 4 avril dernier, la proposition de loi contre l’occupation illicite des logements, que nous évoquions dans une actualité de décembre dernier. Le texte doit maintenant être examiné par le Sénat en deuxième lecture avant un accord entre députés et sénateurs, lors d’un vote en commission mixte paritaire.

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Triplement des sanctions contre l’occupation illicite des logements

Selon le site gouvernemental Vie Publique, la principale mesure du projet de loi anti squats concerne les sanctions encourues par les squatteurs. « Le texte prévoit jusqu’à 3 ans de prison et 45.000 € d’amende, contre 1 an de prison et 15.000 € d’amende aujourd’hui », signale le rapporteur du texte Guillaume Kasbarian, également député Renaissance d’Eur-et-Loir. La loi prévoit aussi d’étendre le délit de violation de domicile aux personnes louant des logements en faisant croire qu’elles en sont propriétaires. 

Le délit visera aussi les locataires qui restent dans leur logement sans payer de loyer, malgré un jugement d’expulsion définitif. Avec le nouveau texte, ils risqueront une amende de 7.500 €, « sauf ceux pouvant être concernés par la trêve hivernale », note Vie Publique

Enfin, le texte de loi entend aussi sanctionner l’occupation de locaux autre qu’une habitation. Ainsi, un nouveau délit « d’occupation frauduleuse d’un local à usage d’habitation ou à usage commercial, agricole ou professionnel » est-il créé. La sanction pourra aller jusqu’à 2 ans de prison et 30.000 € d’amende. 

Réduction drastique des délais contre l’occupation illicite des logements

Le texte de loi indique que le juge ne sera plus autorisé à accorder de longs délais aux squatteurs dont l’expulsion a été ordonnée par la justice. Ceux-ci pourront, tout-au-plus, bénéficier d’un délai compris entre 2 mois et 1 an, au lieu d’un délai compris entre 3 mois et 3 ans, comme c’est le cas actuellement. Une bonne chose sur le principe, mais, dans les faits, le délai de 3 ans n’était qu’exceptionnellement accordé…

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Clause de résiliation de plein droit dans les baux

La loi se propose, par ailleurs, d’accélérer les procédures en cas de loyers impayés, comme nous l’annoncions dans une actualité de novembre dernier. Il est ainsi prévu que soit systématiquement inclus dans les baux une « clause de résiliation de plein droit » (appelée aussi clause résolutoire). Intérêt : éviter que le bailleur ait à engager une action en justice. La loi prévoit, toutefois, que cette clause pourra être suspendue « sur demande du locataire effectuée auprès du juge » et « à certaines conditions. » Depuis toujours, nous vous conseillons, de toute façon, l’insertion systématique d’une telle clause dans vos baux. 

Le texte réduit, enfin, certains délais dans les procédures contentieuses du traitement des impayés de loyers, en particulier pour les locataires de mauvaise foi. La procédure d’expulsion express, sans recours à un juge, est encore étendue aux logements vacants, vides de meubles.

A noter, aussi, qu’un amendement prévoit d’exonérer de l’obligation d’entretien le propriétaire d’une habitation squattée.

Quand l’ONU s’en mêle…

Le fait est assez rare pour être signalé. D’après le journal Le Monde, l’Organisation des Nations Unies a rendu publiques les inquiétudes de ses experts à ce sujet. Dans une communication officielle de 8 pages adressée au gouvernement, le rapporteur spécial de l’ONU sur l’extrême pauvreté et les droits humains, Olivier De Schutter (qui cosigne ce courrier avec le rapporteur spécial de l’ONU sur le logement convenable, Balakrishnan Rajagopal) écrit : « nous alertons sur la régression que constitue cette proposition de loi, et sur le risque qu’elle conduise la France à violer ses engagements internationaux. » Ces deux experts onusiens s’inquiètent de mesures « visant à renforcer les droits des propriétaires de logements, tout en fragilisant (…) les personnes qui occupent un logement sans titre [squatteurs] à défaut de disposer de l’accès à un logement ». Ils indiquent craindre aussi l’accélération de la procédure d’expulsion locative envisagée : « il ne serait pas acceptable, à nos yeux, que les expulsions d’un logement se trouvent facilitées, si ceci ne s’accompagne pas d’un renforcement du droit pour les ménages précarisés d’avoir accès à un logement à un prix abordable », affirment-ils dans le quotidien.

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C’est la première fois que la France est saisie, dans ce cadre, au sujet d’un texte de loi relatif au logement. Une communication qui devrait, en tout cas, plaire à à l’aile gauche des parlementaires, vent debout contre cette loi. « Je lis les avis de l’ONU avec attention, a commenté Guillaume Kasbarian dans Le Monde, mais ce n’est pas l’ONU qui fait les lois en France. » Sauf surprise, cette dernière devrait, donc, être adoptée dans les prochaines semaines, compte tenu de l’équilibre des voix en sa faveur.

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