Droit du locataire en cas de gros travaux : règles, indemnisations et recours

Que recouvrent les « gros travaux » en location ?

On parle de gros travaux lorsqu’une intervention dépasse largement l’entretien courant et les réparations locatives, mobilise un chantier significatif et affecte la jouissance normale du logement.Il s’agit notamment de travaux touchant la structure de l’immeuble, la sécurité des occupants, la performance énergétique ou la mise en conformité réglementaire du logement.

Ces travaux peuvent rendre temporairement inutilisables certaines pièces, perturber l’usage quotidien du logement et ouvrir droit à des compensations pour le locataire.

Cadre juridique applicable

Les droits du locataire et les obligations du bailleur reposent sur plusieurs textes fondamentaux.

Le Code civil impose au bailleur de délivrer un logement en bon état et d’en assurer la jouissance paisible. L’article 1724 précise que lorsque des travaux durent plus de 21 jours et affectent la jouissance, le loyer doit être réduit proportionnellement.

La loi du 6 juillet 1989 complète ce cadre en imposant un logement décent et en rappelant l’obligation du locataire de permettre l’accès aux travaux nécessaires.

Le décret sur la décence précise les exigences minimales en matière de sécurité, de salubrité et de performance énergétique.

Obligations du bailleur pendant les gros travaux

Le bailleur doit maintenir le logement conforme aux normes de décence et de sécurité, même lorsque cela implique des travaux lourds en cours de bail.

En cas de danger, d’insalubrité ou de non-conformité, les travaux deviennent obligatoires et doivent être engagés sans délai excessif.

Lorsqu’une intervention urgente est nécessaire, comme une panne de chauffage en hiver ou une fuite importante, le bailleur doit intervenir immédiatement et proposer, si besoin, des solutions provisoires.

Information préalable du locataire

Avant tout chantier non urgent, le bailleur doit informer le locataire par écrit.

Cette information doit préciser la nature des travaux, leur date de début, leur durée estimée, les plages horaires d’intervention et les modalités d’accès au logement.

Les interventions doivent se dérouler à des horaires raisonnables, en semaine, dans le respect de la vie privée du locataire.

Maintien dans les lieux et relogement

Le principe est le maintien du locataire dans le logement pendant les travaux.

Le bailleur doit organiser le chantier de manière à limiter les nuisances et l’atteinte à la jouissance des lieux.

Lorsque les travaux rendent le logement inhabitable ou qu’un arrêté administratif est pris, le bail peut être suspendu et un relogement temporaire doit être proposé.

Réduction de loyer et indemnisation

Lorsque des travaux durent plus de 21 jours et affectent la jouissance du logement, le locataire a droit à une réduction de loyer.

Cette réduction est calculée en fonction de la durée des travaux et de l’ampleur de la perte de jouissance, par exemple lorsqu’une pièce est inutilisable ou qu’un équipement essentiel est neutralisé.

En plus de la réduction de loyer, le locataire peut obtenir le remboursement de frais justifiés, comme des dépenses liées à un chauffage d’appoint ou à des solutions de remplacement temporaires.

Que faire en cas de blocage ?

Si le bailleur n’agit pas ou ne respecte pas ses obligations, le locataire peut adresser une mise en demeure par lettre recommandée.

À défaut de réponse, une tentative de conciliation via l’ADIL ou la commission départementale de conciliation peut être engagée.

En dernier recours, le locataire peut saisir le juge pour obtenir une injonction d’exécuter les travaux, une réduction de loyer ou des dommages-intérêts.

Peut-on refuser des travaux ?

Le locataire ne peut pas refuser des travaux nécessaires à la décence, à la sécurité ou à la mise en conformité du logement.

Un refus peut toutefois être légitime si les travaux sont abusifs, non annoncés, ou réalisés dans des conditions déraisonnables.

Dans ce cas, il est essentiel de formaliser les objections par écrit et de solliciter une médiation ou une décision judiciaire.

Résiliation du bail en cas de travaux

Si les travaux rendent le logement impropre à l’habitation, le locataire peut demander la résiliation judiciaire du bail.

En dehors de cette situation, le locataire conserve la possibilité de donner congé dans les conditions habituelles de préavis.

À retenir

Les gros travaux n’autorisent pas le bailleur à ignorer les droits du locataire.

Information préalable, réduction de loyer et solutions compensatoires sont des obligations légales lorsque la jouissance du logement est affectée.

Une communication écrite et une traçabilité rigoureuse permettent d’éviter la majorité des contentieux.