Votre propriétaire peut-il entrer dans le logement en cours de bail pour vérifier l’entretien ?

Votre locataire est en place depuis longtemps. Vous vous demandez naturellement si le logement est bien entretenu, si tout se passe correctement et s’il n’y a pas de dégradations « invisibles » depuis l’état des lieux d’entrée.

Mais une question change tout : avez-vous le droit, en tant que propriétaire-bailleur, de pénétrer dans le logement pendant le bail pour « jeter un coup d’œil » ? En 2025, la réponse est strictement encadrée par le droit au respect du domicile du locataire et par les règles de la location d’habitation.

La loi du 6 juillet 1989 n’instaure pas un droit de visite « automatique » du bailleur pour vérifier l’état d’entretien. Le principe, c’est que le locataire a la jouissance paisible du logement et qu’il est chez lui pendant toute la durée du bail.

Pourquoi la tentation est compréhensible… mais juridiquement risquée

Le réflexe est logique : après quelques mois ou quelques années, le propriétaire souhaite vérifier que son bien est correctement occupé, et que l’entretien courant est assuré. D’autant que l’entretien du logement et des équipements, ainsi que les menues réparations, font partie des obligations du locataire pendant le bail.

Cette obligation est notamment rappelée par la loi du 6 juillet 1989 : le locataire doit « user paisiblement » des locaux, répondre des dégradations et prendre à sa charge l’entretien courant. Ce cadre n’autorise pas pour autant le bailleur à entrer librement dans le logement ou à imposer une inspection unilatérale.

Autrement dit, même si vous êtes propriétaire, vous ne récupérez pas un « droit d’accès » permanent une fois les clés remises. Le logement devient le domicile du locataire au sens juridique, et cela implique une protection forte.

Vérifier l’état d’entretien de mon logement : démarche à suivre

Insertion au préalable d’une clause dans le contrat de bail

Attention : le droit de visite annuel du propriétaire ne s’applique pas de plein droit.

En 2025, aucun texte n’accorde au bailleur un droit général de visite « de contrôle » pendant le bail. En revanche, les parties peuvent organiser contractuellement une possibilité de visite, à condition que cela respecte la jouissance paisible du locataire et ne se transforme pas en pression ou en intrusion répétée.

Dans les faits, si vous souhaitez prévoir une visite périodique, il faut l’anticiper et l’encadrer dans le contrat de location, via une clause claire. L’idée n’est pas de créer un droit de visite illimité, mais un mécanisme de rendez-vous, avec un délai de prévenance raisonnable et la possibilité pour le locataire de proposer une autre date.

Une rédaction peut être simple, par exemple : « le bailleur pourra, une fois par an, se rendre dans le logement afin de constater l’état d’entretien de celui-ci. Il devra prévenir le locataire au moins deux semaines avant la date souhaitée de la visite. Le locataire pourra, s’il le souhaite, fixer une autre date, à sa convenance. »

Point important pour la mise à jour 2025 : il faut éviter d’affirmer qu’une clause de visite annuelle « n’a jamais été jugée abusive ». Ce serait inexact à garantir sans une analyse jurisprudentielle exhaustive et récente.

Ce que l’on peut dire de façon solide, c’est que la loi n’organise pas un droit de visite de contrôle, et que toute clause doit rester proportionnée, justifiée, et compatible avec l’obligation de jouissance paisible du locataire.

Dans tous les cas, même avec une clause, vous devrez vous mettre d’accord avec votre locataire sur une date et un horaire. Il est prudent d’obtenir un accord écrit (mail ou message) pour éviter toute contestation sur le consentement et les modalités.

Peut-on entrer sans autorisation si l’on soupçonne un mauvais entretien ?

Non. Entrer sans autorisation n’est pas une « solution » et c’est l’erreur qui peut transformer un simple désaccord locatif en risque pénal.

La protection du domicile est particulièrement forte. Le Code pénal sanctionne l’introduction ou le maintien dans le domicile d’autrui par manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, en dehors des cas où la loi le permet. Depuis 2023, la peine prévue par l’article 226-4 du Code pénal est portée à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

Autrement dit : même si vous êtes propriétaire, entrer de force, profiter d’un double de clés, ou imposer votre présence contre la volonté du locataire peut vous exposer très lourdement. Le domicile protégé, c’est celui de l’occupant, pas celui du propriétaire.

Que faire si je constate que mon logement n’est pas bien entretenu par le locataire ?

Il faut distinguer deux situations. D’un côté, l’usure normale et la vétusté relèvent du vieillissement naturel, qui n’est pas imputable au locataire. De l’autre, le défaut d’entretien courant, l’usage anormal ou les dégradations peuvent engager la responsabilité du locataire.

Si, lors d’une visite réalisée avec l’accord du locataire, vous constatez un mauvais entretien manifeste, vous pouvez formaliser les choses. L’approche la plus utile consiste souvent à envoyer un courrier ou un mail rappelant les obligations d’entretien, en décrivant précisément ce qui a été constaté et en demandant une remise en état dans un délai raisonnable.

Vous pourrez lui notifier que le dépôt de garantie qu’il vous a transmis à son arrivée pourra, le cas échéant, servir à couvrir les réparations dues à des dégradations imputables au locataire, mais uniquement lors du départ et après comparaison avec l’état des lieux de sortie. L’idée n’est pas de « menacer » en cours de bail, mais de rappeler le cadre.

Concrètement, si vous souhaitez contraindre le locataire à respecter ses obligations (par exemple, exécuter une obligation de faire liée à l’entretien ou permettre l’accès dans un cadre légal), vous pouvez vous orienter vers une action devant le tribunal judiciaire. Dans certains cas, une procédure d’injonction de faire peut exister en droit civil pour obliger l’adversaire à exécuter une obligation.

En pratique, selon l’urgence et la nature du problème, les démarches peuvent aussi passer par une tentative amiable, une mise en demeure, puis une procédure au fond ou en référé. L’important est de rester factuel, daté, documenté.

En cas de manquements très importants et persistants, le bailleur peut envisager une résiliation judiciaire du bail pour manquement aux obligations, ce qui rejoint l’idée de « motif réel et sérieux » dans le langage courant. Mais ce type de décision n’est jamais automatique : il faut des preuves et l’appréciation d’un juge.

Que faire si le locataire refuse que je visite mon logement ?

Les actions à éviter

Le locataire en place est chez lui pendant toute la durée du bail et a droit au respect de sa vie privée. Même si une clause de visite est prévue, le refus peut survenir, et la réaction du bailleur doit être maîtrisée.

Ne rentrez surtout jamais sans autorisation. Ne forcez pas une porte. N’utilisez pas un double de clés en l’absence du locataire. Le risque pénal est réel, et la sanction est lourde au regard de l’article 226-4 du Code pénal dans sa version en vigueur.

De plus, au-delà du pénal, une intrusion peut détériorer durablement la relation locative, et se retourner contre vous en cas de futur contentieux (dépôt de garantie, état des lieux, congé, etc.).

Les actions que vous pouvez mener

Si votre demande est légitime, commencez par l’amiable. Proposez plusieurs créneaux, expliquez le motif de façon neutre, et rappelez que la visite se ferait en présence du locataire, sur une durée courte, et à un horaire raisonnable.

Ensuite, si une clause existe dans le bail, vous pouvez rappeler cette clause et demander l’exécution du contrat. Attention toutefois à la réalité pratique : une clause ne donne pas un droit de pénétrer par la force.

En cas de blocage persistant, la voie correcte est la voie judiciaire, devant le tribunal judiciaire, pour faire trancher le litige. Là encore, la stratégie dépend du contexte : suspicion de dégradation grave, nécessité de constater, refus systématique, ou simple inquiétude sans élément objectif.

Gardez aussi en tête que la loi prévoit des situations où l’accès du bailleur peut s’imposer, notamment pour la préparation et la réalisation de travaux, dans des conditions strictes. Le locataire doit alors permettre l’accès, mais pas n’importe comment, ni à n’importe quel moment, et des règles spécifiques existent si les travaux durent longtemps.

Enfin, sur un plan relationnel, il faut éviter que cette visite devienne un point de tension permanent. Dans la majorité des litiges, les conflits éclatent plutôt en fin de bail, au moment de l’état des lieux de sortie et de la restitution du dépôt de garantie, lorsque les parties ne s’accordent pas sur ce qui relève de l’entretien normal ou des dégradations.

À vous de jauger la situation : si le locataire communique bien, paie régulièrement et ne signale aucun problème, une visite « de contrôle » peut être vécue comme intrusive. À l’inverse, en cas de signaux objectifs (plaintes de voisinage, dégâts visibles, humidité non signalée, interventions urgentes), la démarche est plus justifiable et plus facile à défendre.

Par ailleurs, si vous souhaitez connaître les autres cas qui peuvent vous permettre d’accéder à votre logement en cours de location, vous pouvez consulter notre dossier : « Droit de visite du propriétaire : les situations possibles ».

Ce qu’il faut retenir en 2025

En 2025, le bailleur ne dispose pas d’un droit général de visite pour vérifier l’entretien du logement en cours de bail. Toute visite suppose l’accord du locataire, et l’éventuelle clause du bail n’autorise jamais une entrée forcée.

Si vous avez un doute sérieux sur l’entretien, la bonne méthode consiste à dialoguer, formaliser par écrit, et, si nécessaire, saisir le tribunal judiciaire plutôt que de prendre un risque pénal. Le respect du domicile du locataire n’est pas une formalité : c’est une protection au cœur du droit du logement.