Réforme du DPE au 1er janvier 2026 : quel impact pour les logements chauffés à l’électricité ?

Une correction bienvenue pour un calcul obsolète

Depuis plusieurs années, les logements chauffés à l’électricité étaient confrontés à une pénalité dans le calcul du Diagnostic de Performance Énergétique (DPE). En effet, la conversion de l’énergie finale (celle consommée) en énergie primaire (celle nécessaire à sa production) appliquée à l’électricité reposait sur un coefficient de 2,3 : chaque kWh électrique comptait pour 2,3 kWh d’énergie primaire.

Toutefois, ce coefficient ne reflétait plus la réalité du mix électrique français, largement décarboné, en particulier grâce au nucléaire et aux énergies renouvelables. Ce déséquilibre conduisait à des situations paradoxales : des logements plutôt bien isolés chauffés à l’électricité se retrouvaient classés en F ou G alors que leur impact carbone restait modéré.

Pour corriger cette inégalité, un arrêté publié au Journal officiel (le 26 août 2025) fixe l’entrée en vigueur de la mesure au 1er janvier 2026 : le coefficient passe de 2,3 à 1,9 pour les logements chauffés à l’électricité.

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L’administration a précisé que tous les DPE ou audits énergétiques édités à compter de cette date intégreront automatiquement le nouveau coefficient ; ceux réalisés avant resteront valables et pourront être mis à jour gratuitement via l’ADEME sans nouvelle visite obligatoirement.

Autre précision utile pour les bailleurs : cette réforme ne change pas le calcul des consommations réelles ou des usages. Elle modifie seulement la conversion pour le DPE et consomation d’énergie et ne dispense évidemment pas d’améliorer l’isolation ou le système de chauffage. Comme l’explique un article spécialisé, « une meilleure étiquette ne remplace pas des travaux de rénovation énergétique (isolation, ventilation, chauffage performant) ».

Combien de logements sont concernés ? Quelle portée ?

L’estimation la plus reprise est celle d’environ 850 000 logements chauffés à l’électricité qui pourraient sortir du statut de « passoire énergétique » (classes F ou G) sans aucun travaux grâce à cette mesure.

Un autre chiffrage affiche jusqu’à 7 millions de logements susceptibles de gagner une classe énergétique. Dans ce cas, on parle non seulement de sortir des classes F ou G, mais de gagner de A à E voire de F à D selon la situation. Selon une étude, « 91 % des logements qui progressent sont chauffés à l’électricité ».

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Par exemple, un article donne un cas concret : un logement consommant 196 kWh/m²/an en électricité était classé G (196×2,3=451 kWh/m²) et, après la réforme, deviendrait classé F (196×1,9=372 kWh/m²).

Il est également estimé que pour environ 47 % des logements chauffés à l’électricité, un gain d’une lettre est envisageable.

Pour les bailleurs, cette réforme représente une portée réelle : beaucoup de biens aujourd’hui pénalisés par une mauvaise étiquette pourraient redevenir plus attractifs sur le marché locatif ou éviter certaines interdictions de location.

Cependant, l’effet ne sera pas universel : selon un décryptage, « plus de la moitié des DPE (55 %) resteront inchangés ».

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Quelles conséquences concrètes pour les propriétaires bailleurs et les locataires ?

a) Pour le bailleur chauffé à l’électricité

Pour un propriétaire d’un logement chauffé à l’électricité, cette réforme peut être une vraie bouffée d’air. Un meilleur classement DPE est synonyme de :

  • Une amélioration de l’attractivité du bien : une étiquette C ou D sera moins stigmatisante qu’un F ou G pour un locataire.
  • Une possible meilleure valorisation à la revente ou en location : des études montrent que les logements mal classés subissent des décotes (voir encadré « jurisprudence » à la fin).
  • Une éviction partielle voire totale de certaines contraintes réglementaires : les biens classés G sont interdits à la location depuis le 1er janvier 2025 ; si ce logement passe à F ou E grâce à cette réforme, il peut reprendre le cycle locatif ou simplement éviter une interdiction future.

Toutefois, il ne faut pas en tirer une illusion : cette mesure ne remplace pas un bon niveau d’isolation ou une rénovation. Si le logement reste mal isolé ou que les consommations sont élevées, le bailleur reste exposé aux factures importantes, aux demandes de travaux de la part du locataire ou aux risques de vacance. Comme le rappelle un article : « une meilleure étiquette ne remplace pas des travaux de rénovation énergétique (isolation, ventilation, chauffage performant) ».

De plus, le bailleur doit prendre en compte que d’autres obligations pèsent sur les logements « énergivores », notamment : lien avec le dispositif des « passoires thermiques », plan pluriannuel de travaux, aides disponibles, etc. Cette réforme modifie la donne mais n’écarte pas l’ensemble des contraintes.

b) Pour le locataire

Pour le locataire, l’évolution peut être positive : un meilleur classement DPE signifie souvent une facture énergétique moins élevée (ou a minima mieux anticipée), et une meilleure information sur l’efficience du logement.

En revanche, l’impact dépend fortement de la consommation effective. Un logement peu bien isolé mais classé désormais D ou E reste potentiellement coûteux à chauffer. L’étiquette ne garantit pas une facture basse, mais elle fournit un repère amélioré.

Pour les locataires de logements passoires, cette réforme peut éviter des déménagements forcés si le bailleur avait envisagé la sortie du marché locatif en raison de l’étiquette G. Elle permet donc une certaine stabilité.

c) Pour le marché immobilier global

Cette réforme arrive dans un contexte où l’étiquetage énergétique devient de plus en plus déterminant : décotes à la revente, difficulté d’accès au crédit, obligations locatives renforcées, etc. Des logements en F ou G peuvent subir des pertes de valeur importantes.

Avec près d’un bailleur « gagnant » potentiel grâce à la mesure (logement électrique en F ou G), la réforme pourrait désengorger une partie du parc locatif actuellement en difficulté du fait de l’étiquette énergétique. Cela ne signifie pas que tout deviendra facile, mais cela redonne un peu de visibilité.

4. Limites, garde-fous et bonnes pratiques à anticiper

a) Ce que la réforme ne résout pas

Première limite : la réforme ne concerne que le calcul du DPE et uniquement pour les logements chauffés à l’électricité. Les logements chauffés au gaz, au fioul ou au bois ne bénéficient pas de cette mesure. Un bien très mal isolé au fioul reste en situation fragile.

Deuxième point : cette amélioration de l’étiquette ne signifie pas nécessairement une baisse automatique de la consommation réelle, ni des factures. Un logement ancien, avec une isolation déficiente ou un système de chauffage obsolète, pourra toujours être énergivore, même s’il passe de G à F. Un article évoque des effets pervers : « Les étiquettes DPE des logements chauffés à l’électricité seraient artificiellement améliorées, créant un effet de trompe-œil ».

Troisième limite : selon les estimations, 55 % des logements ne verront pas de changement d’étiquette. Autrement dit, la réforme n’est pas une solution miracle pour tous.

b) Recommandations aux bailleurs concernés

Pour un propriétaire bailleur d’un logement chauffé à l’électricité, voici une feuille de route suggérée :

  • Vérifier dès que possible l’étiquette actuelle du bien et simuler l’impact du passage au coefficient 1,9 (des simulateurs sont disponibles en ligne).
  • Même si l’étiquette s’améliore, maintenir voire accélérer les travaux d’isolation (combles, murs, planchers), le contrôle de la ventilation, et envisager un système de chauffage performant. L’étiquette seule ne suffit pas.
  • Anticiper l’information du locataire. Se munir du nouveau DPE à jour, expliquer les évolutions, et intégrer dans la négociation locative les avantages en termes d’étiquette.
  • Si le bien est en mauvais état et chauffé à l’électricité, profiter de cette réforme pour valoriser le logement, mais aussi envisager la sortie du parc locatif ou une rénovation lourde si l’étiquette conserve un niveau fragile.
  • Sur le plan de la revente ou de l’investissement, un bien désormais mieux classé pourra circuler plus facilement sur le marché. Cela peut être un argument pour valoriser le bien ou attirer des locataires plus larges.
  • Rester vigilant : la durée de validité du DPE, les obligations locatives à venir, et la prise en compte réelle de la consommation effective du logement.

c) Impacts stratégiques pour la gestion patrimoniale

Pour un bailleur ou investisseur, cette réforme modifie la manière de regarder le parc chauffé à l’électricité : certains biens qui jusqu’à présent étaient considérés comme « en péril locatif » ou « sous-valorisés » pourraient désormais avoir une seconde vie.

En revanche, cela ne remplace pas la logique d’investissement dans la rénovation énergétique : les maîtres-mots restent : isolation, système de chauffage performant, ventilation, et maîtrise des consommations.

Dans la perspective d’un mix patrimonial, cette réforme peut inciter à revaloriser un bien électrique ancien plutôt que d’abandonner sa mise en location. À condition que le logement fasse l’objet d’une gestion active et d’un suivi des consommations.

La réforme du DPE au 1er janvier 2026, et en particulier la baisse du coefficient de conversion de l’électricité de 2,3 à 1,9, marque une étape significative pour les logements chauffés à l’électricité. Elle vise à corriger un déséquilibre historique qui pénalisait injustement ces logements. Grâce à cette mesure, plusieurs centaines de milliers de logements pourraient à court terme voir leur étiquette énergétique progresser, ce qui constitue une bonne nouvelle pour de nombreux bailleurs et locataires.

Pour autant, cet ajustement ne résout pas tous les enjeux : la performance réelle du logement reste tributaire de l’isolation, du chauffage, des usages. La sensibilisation des bailleurs et des locataires, l’entretien des équipements, la rénovation sont toujours au cœur de la stratégie énergétique patrimoniale.

En tant que spécialiste de la location et de la fiscalité des bailleurs, il est essentiel de suivre dès maintenant cette réforme, de simuler l’impact pour vos logements chauffés à l’électricité, et de l’utiliser comme levier de valorisation ou de repositionnement stratégique.

Sources :

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