Logement insalubre à cause de l’humidité : droits, recours et solutions 2025

En 2024, les ARS (Agences Régionales de Santé) ont recensé environ 12 000 signalements liés à « l’humidité ou aux moisissures », révélant la persistance d’un problème sanitaire majeur dans l’habitat, qualifié à juste titre d’« habitat indigne » (source : DGCL).

Humidité et insalubrité : ce qu’il faut comprendre

Différence entre logement indécent, insalubre et dangereux

Un logement est indécent lorsqu’il ne respecte pas les critères de décence, notamment l’étanchéité aux infiltrations ou aux remontées d’eau (Décret n° 2002‑120). Il devient insalubre s’il représente un risque grave pour la santé, selon l’article L1331‑22 du Code de la Santé Publique. Le statut de logement dangereux se discerne par l’existence d’un péril imminent (risques électriques, structurels…) qui justifie une intervention immédiate.

Voici un tableau comparatif pour clarifier les distinctions — définitions, textes légaux, autorités compétentes et conséquences :

À lire : Loi ALUR et locataire de plus de 65 ans : quelles protections pour les seniors ?

Catégorie Définition / Texte applicable Autorité compétente Conséquences possibles
Logement indécent Absence de protection contre infiltrations (Décret 2002‑120) Mairie, services locaux Travaux exigés au bailleur
Logement insalubre Danger grave pour la santé (CSP art L1331‑22) ARS, maire, préfecture Travaux, relogement ou interdiction d’habiter
Logement dangereux Risques immédiats (électriques, structurels…) Mairie, préfecture Évacuation, relogement, réparations urgentes

Les principaux types d’humidité

Les causes de l’humidité sont variées : la condensation, souvent due à une ventilation insuffisante ou à des ponts thermiques, favorise l’apparition de moisissures logement. L’infiltration trouve son origine dans des défauts de toiture, des façades fissurées ou des joints défectueux. Les remontées capillaires, quant à elles, résultent du manque ou défaut de barrière étanche, laissant les murs poreux absorber l’humidité. Enfin, l’humidité accidentelle, due à un dégât des eaux non traité, peut rapidement détériorer les surfaces concernées. Ce panorama des causes mérite d’être illustré par un schéma radial explicatif.

Risques sanitaires prouvés

L’humidité s’invite dans l’air intérieur, favorisant les spores de moisissures, les acariens et d’autres allergènes. Selon l’OMS, un seuil de 500 cfu/m³ de spores est considéré comme dangereux pour la santé. L’exposition chronique augmente les risques de maladies respiratoires comme l’asthme, les infections ORL et les allergies. Une étude INSERM de 2023 révèle une hausse de 30 % du risque de toux chronique chez les enfants exposés. Il est recommandé de maintenir un taux d’humidité relative entre 45 % et 60 % pour limiter ces effets néfastes.

Obligations du bailleur face à l’humidité insalubre

Obligation de délivrance d’un logement décent – article 6 de la loi du 6 juillet 1989

Le bailleur est tenu de mettre à disposition et maintenir un logement décent durant toute la durée du bail. Depuis 2025, cette exigence inclut une performance énergétique minimale (DPE supérieure à G), impliquant une lutte contre l’humidité pour garantir efficacité thermique et salubrité.

Décret de décence : exigences spécifiques contre l’humidité

L’article 2 du décret de décence impose que le logement soit clos, couvert et étanche, même en ce qui concerne toiture et murs. Par ailleurs, le décret 2017‑312 renforce les critères en intégrant les infiltrations d’air parasites dans l’évaluation de la conformité du logement.

À lire : Combien de loyers impayés avant expulsion ? Tout savoir sur les démarches

Responsabilité civile et pénale du bailleur

Le bailleur a une obligation de résultat en termes de protection de la santé du locataire. En cas de manquement, le locataire peut réclamer dommages‑intérêts ou astreinte si les travaux sont retardés. Bien que l’arrêt de la Cour de cassation du 28 novembre 2024 (Civ. 3ème) ne traite pas directement de l’humidité, il rappelle qu’un bailleur doit garantir un logement décent tout au long du bail, quels que soient l’état initial ou l’origine de l’humidité (ARS Auvergne-Rhône-Alpes, Village de la Justice).

Comment faire reconnaître l’insalubrité liée à l’humidité ?

Reconnaître l’insalubrité due à l’humidité :

  1. Constater l’humidité : réaliser des photos datées, mesurer le taux d’humidité ( > 70 %) à l’aide d’un hygromètre, joindre un certificat médical si des symptômes sont présents.
  2. Notifier le bailleur : envoyer une mise en demeure en lettre recommandée avec accusé de réception, exposer les faits et demander la réalisation urgente des travaux dans un délai (par exemple, 15 jours).
  3. Saisir la CAF : en cas de logement non-décent, la CAF peut suspendre l’APL sur la base de l’article L822‑9 du CCH.
  4. Contacter l’ARS ou la mairie : déposer un signalement justificatif auprès du service hygiène ou logement.
  5. Inspection administrative : un inspecteur évalue, classe le logement (A, B ou C — C signifiant insalubrité grave) et transmet le dossier à la préfecture.
  6. Arrêté préfectoral : si la condition C est retenue, un arrêté peut imposer des travaux, un relogement ou interdire l’occupation.
  7. Suivi : veiller à ce que les prescriptions soient effectives jusqu’à la levée de l’arrêté.

Recours du locataire si le bailleur ne réagit pas

Exception d’inexécution et réduction de loyer

Lorsque la mise en demeure reste sans effet, il est possible d’invoquer l’exception d’inexécution devant le Juge des Contentieux de la Protection. Cependant, comme l’illustre la jurisprudence de la Cour de cassation du 28 novembre 2024, on ne peut interrompre le paiement des loyers que si le logement est véritablement inhabitable. Ce jugement précisait qu’un logement non décent (humidité, moisissures) mais toujours habitable ne justifie pas cette exception (Village de la Justice).

Résiliation judiciaire ou départ anticipé

Si l’habitat reste dégradé plus de deux mois après la mise en demeure, le locataire peut solliciter la résiliation du bail sur le fondement d’une clause résolutoire. Dès lors qu’un certificat ARS démontre une menace pour la santé, le préavis est réduit à un mois conformément à l’article 15‑I de la loi de 1989.

À lire : APL propriétaire : quelles conditions pour en bénéficier en 2025 ?

Dommages-intérêts pour troubles de jouissance

Le locataire peut réclamer une indemnisation couvrant frais d’hébergement provisoire, dommages au mobilier, frais de santé, etc. Inclure un exemple chiffré dans un encadré permet de faciliter la compréhension et la préparation des dossiers juridiques.

Qui finance les travaux contre l’humidité ?

Aides publiques 2025

Le programme MaPrime Logement Décent (MPLD) prend désormais en charge 50 % des travaux anti-humidité, avec un plafond fixé à 25 000 €. Il peut être complété par des dispositifs comme l’Éco‑prêt copropriété ou les aides Actions Logement (subvention ou avance remboursable), sous conditions de ressources et possibilité de cumul.

Assurance propriétaire non-occupant (PNO)

Vérifier si la garantie dégâts des eaux couvre les sinistres liés à l’humidité : attention, la condensation chronique est souvent exclue. En cas de sinistre, la déclaration doit se faire dans les 5 jours pour préserver les droits à indemnisation.

Travaux éligibles et coûts moyens

Les principaux travaux et leurs coûts estimés sont les suivants : drainage périphérique (8 000 à 12 000 €), cuvelage de cave (environ 150 €/m²), VMC double flux (≈ 5 000 €). Il est crucial d’accompagner les demandes de subventions avec devis détaillés.

Prévenir le retour de l’humidité

Ventilation et aération quotidiennes

Il est recommandé d’aérer chaque pièce au moins 10 minutes, matin et soir, de veiller au bon fonctionnement de la VMC et de nettoyer les grilles d’entrée d’air deux fois par an. Ces gestes simples, rappelés par l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes, sont essentiels pour éviter la prolifération des moisissures (Village de la Justice).

Entretien du bâti par le bailleur

Le bailleur doit assurer une maintenance régulière : réviser la toiture, les chéneaux et les joints des fenêtres. Les joints de faïence dans les pièces humides doivent être retraités tous les cinq ans pour éviter les infiltrations.

Bonnes pratiques du locataire

Le locataire doit veiller à ne pas obstruer les aérations, privilégier le séchage du linge à l’extérieur, maintenir une température de 19 °C et peut compléter par des absorbeurs d’humidité si nécessaire (ARS Auvergne-Rhône-Alpes).

FAQ

À quel taux d’humidité un logement devient-il insalubre ?
Un taux dépassant 65–70 % d’humidité relative peut conduire à une qualification d’insalubrité (normes ARS).

Puis-je suspendre mon loyer si le bailleur ne réagit pas ?
Non, sauf décision judiciaire ; en revanche, l’APL peut être suspendue si le logement est jugé non-décent.

Qui paye l’expertise humidité ?
Le bailleur est en principe responsable ; si le juge l’ordonne, le coût peut lui être imputé.

Quelles démarches pour faire intervenir l’ARS ?
Il faut envoyer un signalement accompagné de preuves (photos, mesures), déclencher une visite, obtenir un rapport et, le cas échéant, en obtenir un arrêté préfectoral.

Le bail peut-il être résilié sans préavis ?
Oui, si la situation met gravement la santé en danger, sur décision judiciaire ou grâce à une clause résolutoire, avec réduction du préavis à un mois.

Sources

 

Partagez
Tweetez
Partagez