
Au moment de la sortie d’un locataire, l’état des lieux est souvent source de tensions. Les murs, en particulier, cristallisent de nombreux litiges. Un clou, une cheville ou une fixation de télévision murale peuvent paraître anodins pour l’occupant sortant, mais ils peuvent aussi être considérés comme des dégradations justifiant une retenue sur le dépôt de garantie. Tout dépend du nombre, de la taille et de l’impact visuel de ces trous, ainsi que de l’état initial constaté à l’entrée.
Le sujet mérite d’être clarifié, car entre l’usure normale tolérée et la dégradation imputable au locataire, la frontière n’est pas toujours évidente. Le bailleur doit savoir comment constater ces traces, comment les chiffrer et surtout comment sécuriser sa retenue pour qu’elle soit juridiquement opposable.
Que recouvrent les « trous dans les murs » lors d’un état des lieux
Tous les trous ne se valent pas. Un petit trou d’accroche laissé par un cadre est d’une autre nature qu’un perçage profond pour fixer un meuble de cuisine. Les supports jouent également un rôle : percer du plâtre n’a pas la même conséquence que percer une faïence de salle de bain ou une menuiserie PVC.
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Lors de l’état des lieux, il est donc essentiel de qualifier précisément la nature des trous. On distingue généralement les micro-trous d’accroche, de quelques millimètres, souvent liés à la fixation de tableaux, des trous plus larges laissés par des chevilles ou des fixations métalliques de type Molly, qui affaiblissent le support. Dans certains cas, on rencontre des perçages profonds dans du béton ou de la brique, plus difficiles à reboucher. Les situations les plus sensibles concernent les carrelages de douche ou les menuiseries : un percement dans ces matériaux entraîne souvent des réparations coûteuses et techniquement complexes.
La précision du constat est essentielle. Le bailleur doit noter le nombre exact, la localisation et l’état des trous (rebouchés ou non), ainsi que leur impact sur la peinture ou la finition du mur. Une simple mention “trous dans les murs” est insuffisante. La rigueur de la description conditionne la validité de toute retenue ultérieure.
Usure normale ou dégradation imputable ?
La loi impose de distinguer ce qui relève de l’usure normale de ce qui constitue une dégradation. Quelques petits trous d’accroche, propres et rebouchés, sont considérés comme tolérables, surtout si les murs n’étaient pas neufs à l’entrée du locataire. On parle alors de traces d’usage normal.
En revanche, un grand nombre de trous, des chevilles arrachées laissant des éclats de plâtre, des fixations dans des supports inadaptés ou encore l’absence totale de rebouchage constituent des dégradations. Dans ce cas, la remise en état incombe au locataire sortant.
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Un autre élément joue un rôle central : la vétusté. Si les murs présentaient déjà un état moyen ou ancien lors de l’entrée, le bailleur ne peut pas exiger une remise en état intégrale comme s’il s’agissait de murs neufs. C’est tout l’intérêt de la grille de vétusté prévue dans certains contrats, qui permet de modérer les retenues en fonction de l’âge et de l’usure normale du logement.
En résumé, ce n’est pas tant l’existence de trous qui compte que leur nombre, leur nature et leur impact comparé à l’état initial.
La méthode de constat lors de l’état des lieux de sortie
Pour que la retenue soit recevable, l’état des lieux doit être précis et étayé. La meilleure méthode consiste à examiner chaque pièce, mur par mur, en notant soigneusement les zones concernées. Il est conseillé de photographier les murs en plan large, puis en plan rapproché, avec un repère de taille (mètre ou pièce de monnaie).
La mention doit être descriptive : par exemple, “chambre – mur nord : sept trous de six à huit millimètres, non rebouchés, avec éclats de peinture sur 0,5 m²”. Cette rigueur évite toute contestation future.
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Comparer systématiquement avec l’état des lieux d’entrée est également fondamental. Si un mur présentait déjà des accroches, elles ne peuvent être imputées au locataire. À l’inverse, une différence nette et documentée entre l’entrée et la sortie établit clairement la responsabilité.
Les tarifs de remise en état expliqués
Une question revient souvent : combien coûte réellement la réparation d’un trou dans un mur ? Les tarifs varient selon la taille, le support et la finition à prévoir.
Un micro-trou peut être rebouché facilement avec un enduit, un ponçage et une retouche de peinture. Pour un professionnel, le coût reste modeste, surtout si plusieurs trous sont regroupés. En revanche, une cheville ou une fixation métallique demande une intervention plus longue, souvent en plusieurs passes, avec un surcoût sensible.
Lorsque la retouche de peinture laisse une différence de teinte, il faut envisager une reprise plus large, parfois tout un pan de mur. Dans ce cas, la facturation se fait au mètre carré, avec préparation, deux couches de peinture et temps de séchage. Les coûts augmentent rapidement, en particulier si la peinture initiale est de qualité.
Les supports particuliers compliquent la réparation. Un carreau de faïence percé implique souvent son remplacement, ce qui peut représenter une centaine d’euros par carreau, hors main d’œuvre, surtout si le modèle est ancien et difficile à retrouver. Un mur en béton demande plus de travail qu’une cloison en plâtre, et une menuiserie percée peut nécessiter le remplacement d’une partie de l’ouvrant.
Enfin, il faut prendre en compte les frais annexes : déplacement de l’artisan, fournitures, protection du chantier. Un artisan facture souvent un forfait minimum, couvrant au moins une heure de main-d’œuvre et les frais de déplacement.
Comment décider d’une retenue sur le dépôt de garantie
La décision de retenir une somme sur le dépôt de garantie doit être proportionnée. Si les trous sont peu nombreux et rebouchés correctement, aucune retenue n’est justifiée. En revanche, si les murs sont sérieusement détériorés ou nécessitent une reprise complète, la retenue est possible.
Le bailleur doit alors notifier sa décision par écrit, en détaillant la nature des dégradations, leur localisation et le montant estimé de la remise en état. Ce courrier doit être accompagné de devis ou de factures, qui serviront de preuve en cas de contestation. Le solde du dépôt de garantie doit être restitué dans le délai légal de un mois en l’absence de dégradation, ou de deux mois en cas de retenue justifiée.
Il est déconseillé de retenir un montant forfaitaire non justifié, car le locataire pourrait facilement obtenir gain de cause devant un juge. La clé réside dans la transparence et la documentation.
Le chiffrage pas à pas
Pour être incontestable, le chiffrage doit suivre une logique claire. D’abord, qualifier la réparation : simple rebouchage, reprise d’une zone, pan de mur complet ou remplacement de carreau. Ensuite, estimer le temps nécessaire, en tenant compte du ponçage, du rebouchage en plusieurs passes, du masquage et des temps de séchage.
Il faut ensuite ajouter le coût des fournitures réelles : enduits, sous-couche, peinture, outils consommables. Puis inclure les frais de déplacement et le forfait minimum de l’artisan. Enfin, appliquer la règle de vétusté si le mur n’était pas neuf à l’entrée.
Un exemple concret peut illustrer cette méthode. Dans un salon, six trous de six à huit millimètres nécessitent un rebouchage suivi d’une reprise locale de peinture. Un artisan facture alors quelques dizaines d’euros, déplacement inclus. Si la reprise d’un pan de mur entier s’impose pour homogénéiser la teinte, le coût grimpe à plusieurs centaines d’euros. L’essentiel est de justifier pourquoi une réparation plus lourde est nécessaire.
Les cas particuliers
Certains cas nécessitent une vigilance accrue. Percer un carreau de faïence dans une douche peut entraîner un risque d’infiltration. La réparation impose alors un remplacement complet du carreau, voire du joint d’étanchéité.
Les percements dans les menuiseries PVC ou aluminium posent aussi problème. Ils sont généralement interdits et nécessitent parfois le remplacement de l’ouvrant. Les fixations lourdes dans des cloisons en plâtre (téléviseurs muraux, placards suspendus) fragilisent le support et exigent des réparations renforcées.
Enfin, si le logement venait d’être repeint à l’entrée, le seuil de tolérance est plus bas. Les dégradations seront plus facilement considérées comme imputables au locataire. À l’inverse, dans un logement ancien, la vétusté relativise les retenues possibles.
FAQ
Les petits trous de tableaux sont-ils facturables ?
Non, s’ils sont peu nombreux et rebouchés correctement. Oui, s’ils sont nombreux, mal rebouchés ou laissent des traces visibles.
Peut-on faire payer la peinture complète d’une pièce ?
Uniquement si une reprise locale est impossible sans différence de teinte, et en tenant compte de la vétusté.
Combien coûte la réparation d’un trou ?
On évite de raisonner au tarif par trou. Le coût dépend du temps de main-d’œuvre, des fournitures et de l’ampleur de la reprise.
Et si le mur était déjà abîmé à l’entrée ?
Le locataire ne peut pas être tenu responsable de dégradations antérieures. D’où l’importance d’un état des lieux d’entrée précis.
Quelles preuves fournir pour une retenue ?
Un état des lieux comparatif, des photos claires, un devis ou une facture détaillée, et une explication du choix technique de réparation.
Conclusion
Les trous dans les murs constituent un motif fréquent de litige au moment de l’état des lieux. La clé réside dans la précision du constat, la distinction entre usure normale et dégradation, et la proportionnalité de la retenue. Le bailleur qui documente son calcul avec des photos, des devis et un raisonnement clair met toutes les chances de son côté pour obtenir gain de cause.
Pour simplifier la gestion de ces situations, Gererseul.com propose aux bailleurs des outils pratiques : modèles de lettres de retenue, simulateurs de calcul et assistance juridique. Autant d’atouts pour sécuriser la restitution du dépôt de garantie et éviter des litiges longs et coûteux.
Sources
- Service-public.fr – Dépôt de garantie et état des lieux
- ANIL – Obligations du locataire et dégradations
- Notaires de France – État des lieux et responsabilités