Lorsqu’un propriétaire choisit de souscrire une assurance loyers impayés (GLI), il cherche avant tout à se protéger contre les risques de défaillance de paiement de son locataire. Pourtant, il arrive fréquemment que le dossier soit refusé, soit dès la souscription, soit au moment de l’indemnisation.
Dans le premier cas, l’assureur juge que le risque est trop important et refuse d’accorder sa garantie. Dans le second, le contrat existe bien, mais l’assureur refuse de couvrir le sinistre pour cause de procédure irrégulière ou de clause non respectée. Ces situations, souvent frustrantes, ne sont pas irréversibles. En comprenant leurs causes et les leviers de correction, le bailleur peut non seulement rétablir sa couverture, mais aussi éviter qu’un refus ne se reproduise.
Comprendre le refus à la souscription : les critères cachés des assureurs
Lorsqu’un assureur examine une demande de garantie, il évalue avant tout la solvabilité du candidat locataire et la conformité juridique du dossier. Les compagnies appliquent des grilles internes qui reposent sur des seuils de taux d’effort, de stabilité d’emploi et de conformité du bail. L’un des motifs les plus courants de refus concerne un taux d’effort trop élevé. Si le loyer charges comprises représente plus de 33 à 35 % des revenus nets du locataire, l’assureur considère le risque de non-paiement comme trop important. Un candidat gagnant 1 900 euros nets ne pourra donc pas prétendre à un loyer supérieur à 630 euros environ. Pour un couple percevant 3 400 euros, la limite tournera autour de 1 100 à 1 200 euros.
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Ce ratio n’est pas absolu : certains assureurs préfèrent raisonner en “reste à vivre”, c’est-à-dire en montant disponible après paiement du loyer et des charges incompressibles. Dans ce cas, un revenu moins élevé peut être accepté, à condition que le locataire conserve une marge suffisante pour ses dépenses courantes.
Un autre motif fréquent de refus tient à la nature des revenus. Les profils atypiques — indépendants, intermittents, intérimaires, étudiants — ne répondent pas toujours aux critères de stabilité exigés. Les compagnies exigent souvent deux ans d’ancienneté pour un travailleur non salarié ou une série continue de missions pour un intérimaire. L’absence de garant conforme ou de justificatifs solides peut également bloquer l’acceptation du dossier. Pour les étudiants ou jeunes actifs, la solution consiste généralement à recourir à la garantie publique Visale, gérée par Action Logement, qui couvre gratuitement les loyers impayés et dégradations pour les bailleurs.
Les refus peuvent aussi découler de pièces non conformes ou d’un dossier incomplet. L’assureur exige des documents originaux, récents et cohérents : bulletins de salaire, contrat de travail, quittances signées, avis d’imposition. Un justificatif illisible ou incohérent — comme une capture d’écran ou une fausse quittance — suffit à invalider la demande. Il convient donc de vérifier soigneusement la cohérence de l’ensemble avant transmission.
La nature du bail et du logement entre également en ligne de compte. Certains assureurs n’acceptent pas les locations saisonnières, les résidences secondaires, ou les baux meublés à usage temporaire tels que le bail mobilité. D’autres excluent les logements ne répondant pas aux critères de décence légale, comme une surface habitable inférieure à neuf mètres carrés. Enfin, le montant du loyer peut lui-même poser problème : chaque assureur fixe des plafonds de loyer selon la localisation du bien, au-delà desquels il refuse d’intervenir.
Le cumul entre GLI et caution physique entraîne lui aussi des refus automatiques. La plupart des assureurs interdisent la double protection, sauf pour des profils particuliers comme les étudiants ou les apprentis. Si le contrat le prohibe, le propriétaire doit choisir l’une ou l’autre des garanties, sous peine de nullité du contrat.
Le refus d’indemnisation : quand la procédure fait défaut
Une autre forme de refus survient lorsque le bailleur a bien souscrit une assurance loyers impayés, mais que l’assureur refuse d’indemniser au moment du sinistre. Dans la majorité des cas, ce refus n’est pas lié au fond du problème — un locataire défaillant — mais à une erreur de procédure.
La première cause concerne un bail non conforme. Certains contrats d’assurance exigent que le bail contienne une clause résolutoire parfaitement rédigée, permettant la résiliation automatique en cas de non-paiement. Si cette clause manque ou si le bail ne respecte pas la loi du 6 juillet 1989 (par exemple, absence d’état des lieux ou de mention du dépôt de garantie), la garantie peut être annulée. D’où l’importance, avant toute mise en location, de faire relire son contrat de bail ou d’utiliser un modèle conforme aux dernières évolutions légales.
La deuxième erreur concerne la déclaration tardive du sinistre. Les compagnies exigent en général que le propriétaire signale l’impayé dans les trente jours suivant le premier retard. Au-delà de ce délai, l’assureur peut refuser la prise en charge. Il est donc recommandé d’envoyer la première relance dès cinq jours de retard, puis la mise en demeure quinze jours plus tard. À trente jours, la déclaration de sinistre doit être faite, accompagnée des preuves de relance. À soixante jours, le bailleur doit avoir fait délivrer un commandement de payer par commissaire de justice. Si aucune régularisation n’intervient, le dossier judiciaire doit être constitué avant quatre-vingt-dix jours.
Les manquements dans la chaîne des actes juridiques constituent une autre source de rejet. Un commandement de payer non signifié, un acte d’huissier manquant ou un dossier incomplet interrompent la procédure et rendent la garantie inopérante. Les assureurs exigent la preuve de chaque étape, y compris les copies des lettres recommandées et des procès-verbaux de signification.
Le changement de locataire sans notification à l’assureur est également une cause classique d’exclusion. En cas de départ anticipé, de sous-location ou de colocation non déclarée, la garantie initiale ne s’applique plus, sauf avenant explicite au contrat.
Enfin, un dossier initial non conforme — par exemple un candidat mal vérifié, des quittances fictives ou des revenus surévalués — peut entraîner la nullité du contrat et priver le bailleur de toute indemnisation. Dans ce cas, la seule issue est de tenter une transaction amiable ou d’engager une action de recouvrement par voie judiciaire.
Comment réagir après un refus : les solutions efficaces
Un refus de souscription n’implique pas nécessairement de changer de locataire. Si le candidat est solvable, il est souvent possible de réajuster les paramètres du dossier. Baisser légèrement le loyer ou ajouter un co-preneur peut suffire à repasser sous les seuils d’acceptation. Certains assureurs, plus souples, prennent en compte la situation globale du ménage plutôt qu’un seul revenu individuel. Une autre option consiste à solliciter un réexamen du dossier, en fournissant les justificatifs corrigés et une lettre explicative claire.
Pour les profils hors cadre mais solvables — indépendants récents, intérimaires ou étudiants —, des solutions alternatives existent. Le dispositif Visale, géré par Action Logement, prend en charge gratuitement les impayés et dégradations dans la limite d’un plafond. Ce système, entièrement dématérialisé, s’applique aux logements nus ou meublés constituant la résidence principale du locataire. Il est cumulable avec une caution physique, à la différence de la plupart des GLI commerciales.
En dehors de Visale, le propriétaire peut accepter un garant physique ou recourir à une caution bancaire. Cette dernière consiste à bloquer sur un compte une somme équivalente à plusieurs mois de loyer, servant de garantie en cas de défaillance. Enfin, certains assureurs dits “souples” acceptent désormais des profils indépendants ou non-salariés, à condition de fournir un historique de revenus stable sur deux exercices.
Lorsqu’un refus d’indemnisation intervient en cours de bail, la priorité est de régulariser la procédure. Le bailleur doit compléter le dossier avec les pièces manquantes, relancer officiellement le locataire et produire les actes nécessaires. Dans la plupart des cas, un dialogue avec l’assureur permet d’obtenir un réexamen. Il est essentiel de ne pas interrompre la procédure judiciaire, car l’assureur n’interviendra que si les délais légaux sont respectés.
Les situations les plus complexes concernent les baux atypiques : colocations, logements meublés ou logements loués via bail mobilité. Certains assureurs exigent un bail unique avec clause de solidarité entre les colocataires, d’autres refusent ces formules. Dans ces cas, mieux vaut anticiper et choisir un contrat d’assurance adapté à la configuration du logement.
Comment éviter le prochain refus : un processus d’évaluation en amont
La meilleure façon d’éviter un refus est de professionnaliser la sélection du locataire. Dès la mise en location, le propriétaire devrait annoncer clairement les critères exigés : niveau de revenus, stabilité professionnelle, documents requis. Une prévalidation du dossier auprès de l’assureur, ou via un simulateur en ligne, permet de détecter d’éventuels blocages avant la signature du bail.
Il est ensuite indispensable de vérifier la conformité du contrat de location. Le bail doit mentionner la clause résolutoire, le dépôt de garantie, la durée du contrat et la destination du bien. Pour une colocation, il est préférable d’opter pour un bail unique, sauf si l’assureur accepte les baux multiples.
Le dossier du locataire doit être archivé en version numérique avec les métadonnées intactes, afin de prouver son authenticité en cas de litige. Enfin, la souscription à la GLI doit intervenir avant l’entrée dans les lieux, faute de quoi la compagnie pourra refuser la couverture.
En cas de doute, le propriétaire peut demander à son assureur un contrôle de conformité avant signature. Ce “pré-audit” garantit que toutes les conditions sont réunies pour qu’un éventuel sinistre soit indemnisé sans contestation.
Les refus de garantie loyers impayés résultent le plus souvent de procédures mal comprises ou de documents incomplets, plus que d’un véritable défaut de solvabilité du locataire. Une approche rigoureuse, combinant vérification des revenus, conformité du bail et anticipation des obligations contractuelles, suffit dans la majorité des cas à sécuriser la location.
La clé reste la traçabilité : chaque acte, chaque courrier, chaque pièce justificative doit pouvoir être produit à tout moment. Face à un refus, il est toujours possible de régulariser la situation ou d’adopter une solution alternative comme Visale, un garant tiers ou une caution bancaire. En amont, le propriétaire doit veiller à adapter sa sélection et son contrat aux exigences de son assureur pour garantir une protection efficace et durable.
Sources :
- Loi n°89-462 du 6 juillet 1989, tendant à améliorer les rapports locatifs – Légifrance
- Code des assurances – Articles L113-2 et L113-3
- Action Logement – Dispositif Visale : visale.fr
- DGCCRF – Guide “Assurances loyers impayés : obligations et garanties”
- Service-public.fr – Fiche “Assurance loyers impayés : fonctionnement et conditions”
