Quand et comment réclamer la taxe d’ordures ménagères à son locataire ? Délais légaux & bonnes pratiques

Chaque automne, les propriétaires reçoivent leur avis de taxe foncière. Parmi les lignes qui composent ce document fiscal figure une charge bien particulière : la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Contrairement à la taxe foncière en elle-même, cette dépense peut être récupérée auprès du locataire. Mais attention : la loi encadre strictement le moment et la manière dont cette régularisation doit intervenir.

Pour le bailleur, il ne s’agit pas simplement d’envoyer une facture au hasard. Il existe un calendrier précis, des justificatifs obligatoires et une prescription légale de trois ans. Mal anticiper la TEOM ou négliger de la réclamer dans les délais peut priver définitivement le propriétaire de cette somme.

Dans cet article, nous vous livrons un guide complet : bases juridiques, calendrier annuel, régularisation tardive, cas d’un locataire sortant, et modèle pratique de notification.

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Rappel : pourquoi la TEOM est-elle récupérable ?

Fondements juridiques

Le décret n°87-713 du 26 août 1987, qui fixe la liste des charges récupérables, mentionne expressément la taxe d’enlèvement des ordures ménagères. Elle figure donc dans les dépenses que le bailleur peut légalement refacturer au locataire.

Par ailleurs, l’article 23 de la loi du 6 juillet 1989 impose une régularisation annuelle des charges récupérables. Autrement dit, la TEOM n’est pas une option : elle doit être intégrée dans le décompte des charges, même si elle ne représente qu’une partie limitée du budget global du logement.

Il est important de distinguer la TEOM de la REOM (redevance d’enlèvement des ordures ménagères). La première est un impôt adossé à la taxe foncière, la seconde est une redevance facturée directement par la collectivité. La TEOM est toujours récupérable, la REOM l’est également, mais son mode de facturation diffère : elle peut arriver directement au nom du propriétaire ou du syndic.

Où apparaît-elle ?

La plupart du temps, sur l’avis de la taxe foncière, la TEOM se situe généralement à la ligne « 1520 ». Cette ligne indique le montant exact dû pour l’année en cours.

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Dans le cas d’un immeuble en copropriété, la TEOM peut aussi être répercutée via l’arrêté des comptes établi par le syndic, qui détaille la part imputée à chaque lot. Dans tous les cas, le bailleur doit conserver ces documents : ils constituent la preuve indispensable à joindre au décompte annuel remis au locataire.

Le calendrier normal : provision mensuelle puis régularisation annuelle

Provision de charges

La bonne pratique consiste à prévoir une provision mensuelle de charges dans le bail. Le locataire verse ainsi chaque mois une avance couvrant eau, entretien, ascenseur… et TEOM. Cette méthode permet de lisser la dépense et d’éviter des appels de fonds trop lourds.

Cependant, encore faut-il que la provision soit réaliste. Si le bailleur fixe une provision trop basse, il devra réclamer un rattrapage important lors de la régularisation. Inversement, une provision trop élevée peut entraîner un remboursement au locataire. L’équilibre repose sur une estimation sérieuse, souvent basée sur les charges de l’année précédente.

Réception de l’avis foncier (septembre-octobre)

Le moment clé intervient à l’automne, lorsque le propriétaire reçoit son avis de taxe foncière. C’est seulement à ce moment-là que le montant réel de la TEOM est connu.

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Avant de la répercuter, le bailleur doit examiner attentivement le document. En particulier, il ne faut pas confondre la TEOM avec les frais de gestion de 8 %, également mentionnés sur l’avis. Ces frais correspondent à la rémunération de l’administration fiscale et ne sont pas récupérables auprès du locataire.

Notification un mois avant la régularisation

La loi impose un délai de prévenance : le bailleur doit transmettre au locataire le décompte des charges au moins un mois avant l’appel de fonds. Ce décompte doit être accompagné des justificatifs (avis foncier, tableau de répartition, comparatif avec les provisions versées).

Pour des raisons de preuve, il est fortement conseillé d’envoyer cette notification en lettre recommandée avec accusé de réception ou via un espace locataire dématérialisé avec horodatage.

Date butoir de régularisation annuelle

La loi n’impose pas de date fixe. En pratique, la plupart des bailleurs régularisent avant le 31 décembre de l’année suivant celle des charges. Exemple : TEOM 2024 régularisée au plus tard fin 2025.

Ce délai n’est pas impératif, mais il reste préférable. Car au-delà, on s’approche dangereusement du délai de prescription triennale.

Régularisation tardive : jusqu’où peut-on aller ?

Prescription de 3 ans

L’article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989 fixe le délai de prescription : le bailleur dispose de trois ans pour réclamer les charges locatives, à compter de leur exigibilité.

Concrètement, une TEOM 2022 exigible en 2023 pourra être réclamée jusqu’au 31 décembre 2026. Au-delà, le droit est éteint : même si la charge a bien été payée par le propriétaire, il ne pourra plus la récupérer.

Jurisprudence récente

La Cour d’appel de Paris (2024) a confirmé cette règle : un bailleur peut réclamer plusieurs années de TEOM non régularisées, mais uniquement dans la limite des trois dernières années. En revanche, faute de justificatifs, les juges ont sanctionné une déchéance partielle.

Cela rappelle un principe fondamental : sans justificatif, pas de régularisation possible. Les documents originaux doivent être conservés et fournis au locataire en cas de contestation.

Impact d’un retard pour le bailleur

Outre le risque de prescription, un retard dans la régularisation peut provoquer des tensions. Le locataire peut saisir la commission départementale de conciliation, voire le tribunal, surtout si la régularisation porte sur plusieurs années.

Certains juges n’hésitent pas à sanctionner le bailleur en cas de clauses abusives (par exemple une clause imposant des pénalités de retard non prévues par la loi).

La meilleure pratique reste donc de régulariser chaque année, quitte à ajuster l’année suivante si des corrections s’avèrent nécessaires.

Cas particulier : locataire sortant avant la régularisation

Retenue de 20 % sur le dépôt de garantie

Lorsqu’un locataire quitte le logement avant que l’avis de taxe foncière ne soit connu, le bailleur se retrouve face à un dilemme. La loi autorise une pratique : retenir jusqu’à 20 % du dépôt de garantie afin de couvrir la régularisation future des charges.

Cette retenue doit être clairement mentionnée dans l’état des lieux de sortie et justifiée par la pratique de charges « au réel ». Une fois l’avis reçu, le bailleur dispose d’un mois pour solder définitivement le compte.

Comment calculer la quote-part prorata temporis

Le calcul repose sur une formule simple :

(Montant TEOM ÷ 365) × nombre de jours d’occupation

Exemple : pour une TEOM annuelle de 300 €, un locataire ayant occupé le logement 210 jours devra 172,60 €. Ce type de calcul doit être présenté sous forme de tableau clair pour éviter toute contestation.

Que faire si le bailleur oublie la retenue ?

Si le dépôt de garantie a déjà été restitué en totalité, le bailleur conserve malgré tout la possibilité de réclamer la TEOM dans le délai de trois ans. En revanche, il devra passer par une demande séparée, ce qui peut compliquer les relations avec l’ancien locataire.

Mode d’emploi : réclamer la TEOM en 4 étapes

  1. Collecter les justificatifs : avis de taxe foncière, arrêté de comptes du syndic.
  2. Calculer : retirer les 8 % de frais de gestion non récupérables, appliquer un prorata si nécessaire.
  3. Notifier : envoyer au locataire un décompte clair avec justificatifs, par courrier RAR ou espace en ligne.
  4. Encaisser ou régulariser : ajuster la provision mensuelle pour l’année suivante si l’écart dépasse 10 %.

FAQ

Puis-je réclamer la TEOM après deux ans d’oubli ?
Oui, dans la limite des trois ans. Exemple : vous pouvez réclamer la TEOM 2022 jusqu’au 31 décembre 2026.

Quels justificatifs dois-je fournir au locataire ?
L’avis de taxe foncière (ligne TEOM), ou l’arrêté de comptes du syndic. Sans justificatif, la régularisation peut être annulée.

La TEOM est-elle récupérable en location meublée au forfait ?
Non. En meublé au forfait, le loyer inclut les charges de manière fixe. Le bailleur ne peut pas réclamer de supplément lié à la TEOM, même si elle augmente.

Que faire si le locataire conteste le montant ?
Il peut saisir la commission de conciliation. Le bailleur doit alors produire ses justificatifs. La bonne foi et la transparence sont vos meilleurs alliés.

Puis-je réclamer des intérêts de retard ?
Uniquement si une clause expresse du bail le prévoit et qu’elle n’est pas jugée abusive. Dans la pratique, mieux vaut s’en tenir au montant exact de la régularisation.

Anticiper pour éviter les litiges

La TEOM est une charge récupérable, mais son encadrement légal impose rigueur et méthode. Anticiper via une provision réaliste, conserver les justificatifs, régulariser chaque année et respecter le délai de trois ans : telles sont les bonnes pratiques à adopter.

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