Lorsque le logement loué n’est pas raccordé au tout-à-l’égout, il dispose d’un assainissement non collectif (ANC), généralement une fosse toutes eaux reliée à un dispositif d’épuration. À la sortie du locataire, la question revient souvent : faut-il exiger une vidange avant l’état des lieux ? Et surtout, qui doit la payer ?
L’enjeu est simple : laisser une installation fonctionnelle, entretenue et conforme à la réglementation. Mais la responsabilité varie selon la nature de l’entretien et le moment de la vérification.
Qui paie la vidange : locataire ou propriétaire ?
Le décret n°87-712 du 26 août 1987, annexe II, fixe la liste des réparations locatives à la charge du locataire. Il y est clairement indiqué que l’entretien courant des fosses septiques, puisards et fosses d’aisance, incluant la vidange, relève de la responsabilité du locataire. Autrement dit, la vidange est assimilée à une réparation locative, au même titre que le ramonage d’une cheminée ou le nettoyage d’un siphon.
Le propriétaire, de son côté, reste responsable de la conformité de l’installation vis-à-vis du SPANC (Service Public d’Assainissement Non Collectif). Il doit en particulier assurer les visites périodiques, le bon fonctionnement de la filière et la réalisation des travaux éventuels si une non-conformité est constatée.
Ainsi, le locataire entretient et vidange, tandis que le bailleur garantit la conformité du système. Une répartition simple, à condition de la rappeler dans le bail et de bien consigner les preuves d’entretien.
Quand la vidange est-elle exigible ?
Contrairement à une idée reçue, il n’existe pas d’obligation automatique de vidanger la fosse à chaque départ de locataire.
La fréquence dépend de l’état de remplissage de la cuve et non de la durée d’occupation.
Techniquement, une vidange s’impose lorsque le niveau de boues atteint environ 50 % du volume utile de la fosse (ou selon les préconisations du fabricant). En pratique, cela correspond à une fréquence moyenne de tous les 4 à 5 ans, mais elle peut varier selon la taille de la cuve, le nombre d’occupants ou la nature des eaux usées.
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Si l’état de la fosse ne justifie pas encore une intervention, le locataire n’a pas à la vidanger au moment du départ. À l’inverse, si le niveau de boues est élevé, ou si aucun justificatif récent n’est présenté, la vidange peut être exigée avant la restitution des clés.
Bon à savoir : le propriétaire ne peut pas imposer une vidange “par principe”. Elle doit reposer sur un constat objectif du niveau de boues ou sur l’absence de preuve d’entretien.
Comment vérifier lors de l’état des lieux de sortie
L’état des lieux est le moment idéal pour contrôler l’entretien du système. Le bailleur (ou son mandataire) peut demander au locataire de présenter le Bordereau de Suivi des Matières de Vidange (BSMV), remis par le professionnel agréé lors de chaque intervention. Ce document mentionne la date, le volume pompé, le numéro d’agrément du vidangeur et la destination des boues. Il doit être conservé 10 ans.
En l’absence de justificatif, le bailleur peut procéder à une vérification visuelle (ou par un professionnel) de la hauteur de boues, à l’aide d’une règle ou d’une tige graduée. Si la proportion dépasse 50 %, la vidange est due.
Les odeurs fortes, un reflux d’eaux usées ou un préfiltre encrassé sont autant d’indices d’un entretien insuffisant.
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Formule à insérer dans l’état des lieux :
« ANC – fosse toutes eaux : BSMV du 15/07/2023 fourni, volume 3 m³, vidangeur agréé n°…, hauteur de boues estimée à 30 % → vidange non exigible. »
ou
« ANC – aucun justificatif présenté, boues estimées à 60 % → vidange due à la charge du locataire. »
Les justificatifs à exiger pour éviter tout litige
Le BSMV est la preuve principale. Sans lui, impossible de prouver que la vidange a bien été réalisée par un prestataire agréé. Une simple facture peut compléter le dossier, mais elle doit comporter le numéro d’agrément préfectoral de l’entreprise, la date d’intervention, le volume pompé et la localisation du site.
Les interventions “au noir” ou réalisées sans agrément ne sont pas recevables vis-à-vis du SPANC et ne peuvent donc pas être considérées comme valides.
Le bailleur peut également demander une attestation d’entretien du bac à graisses ou du préfiltre, notamment si ces dispositifs sont installés.
Que faire selon les cas rencontrés à la sortie
Si le BSMV est récent (moins de deux ans) et que le niveau de boues est inférieur à 50 %, rien n’est exigible. Il suffit de consigner la preuve dans l’état des lieux.
En revanche, en l’absence de justificatif et avec des boues trop importantes, le bailleur peut exiger la vidange avant la restitution des clés. Si le locataire refuse, le coût peut être retenu sur le dépôt de garantie, à condition d’être appuyé par un devis ou une facture d’un professionnel agréé.
Dans le cas plus rare où le locataire prouve une vidange récente, mais que la fosse est déjà pleine, cela peut révéler un problème structurel (filière sous-dimensionnée, infiltration défectueuse). Cette situation relève alors de la responsabilité du propriétaire, qui devra faire contrôler l’installation par le SPANC.
Enfin, les travaux de mise aux normes ou de réhabilitation complète (changement de fosse, curage du réseau, remplacement du filtre) sont considérés comme des grosses réparations à la charge exclusive du bailleur.
Imputer la vidange sur le dépôt de garantie : méthode et précautions
La retenue sur le dépôt de garantie est possible si la vidange était due et n’a pas été effectuée. Le bailleur doit alors justifier le montant par un devis ou une facture réelle, sans appliquer de forfait arbitraire.
Le courrier adressé au locataire doit rappeler :
- L’état initial et final constaté
- Les mesures ou observations (boues, odeurs, absence de BSMV)
- Le montant de la vidange et la pièce justificative jointe
- Le solde du dépôt de garantie restant dû
En cas de refus du locataire : recours possibles
Si le locataire conteste ou refuse de payer, le bailleur doit commencer par une mise en demeure en recommandé avec accusé de réception.
Cette lettre doit rappeler le fondement juridique (annexe IV-c du décret n°87-712) et donner un délai raisonnable pour régulariser ou accepter la retenue sur dépôt.
En l’absence de réponse, le bailleur peut engager une procédure d’injonction de payer, simple et adaptée, dès lors que le dossier comporte :
- Le bail et les états des lieux d’entrée et de sortie
- Les échanges écrits
- Le devis ou la facture d’un vidangeur agréé
- Le BSMV ou son absence constatée
Cette procédure, peu coûteuse, repose sur des preuves matérielles solides et permet d’obtenir le règlement rapide du différend.
Ce que le locataire ne paie jamais
Certaines dépenses ne peuvent jamais être imputées au locataire :
les contrôles périodiques du SPANC, les travaux de mise en conformité, le curage du réseau d’infiltration ou encore la réhabilitation complète du dispositif. Ces obligations relèvent du propriétaire, en sa qualité de détenteur de l’installation d’assainissement.
Combien coûte une vidange ?
Le coût d’une vidange standard réalisée par une entreprise agréée se situe généralement entre 150 et 450 €, selon la capacité de la cuve, l’accessibilité et la région.
Un devis plus élevé peut être justifié si le bac à graisses doit être nettoyé, si le camion de pompage ne peut pas se stationner à proximité immédiate, ou si une pompe de relevage est nécessaire.
Sources :
- Service-public.fr – Réparations locatives
- Ministère de la Transition écologique – Assainissement non collectif
- ANIL – Obligations locatives liées à l’entretien des installations d’assainissement