Dans le langage courant, on parle souvent de “caution”, mais le terme juridique exact est dépôt de garantie. Cette somme versée à l’entrée dans un logement locatif a pour objectif de couvrir les manquements potentiels du locataire, notamment les dégradations ou impayés. La loi encadre strictement sa restitution : un mois si l’état des lieux est conforme, deux mois en cas d’écarts constatés. Pourtant, de nombreux litiges naissent d’un dépôt non restitué dans les délais. Cet article expose en détail vos droits, les obligations du bailleur, les pénalités applicables et les démarches efficaces pour récupérer votre argent.
Le point de départ des délais est toujours la remise des clés, acte qui matérialise la fin de la location. Lorsque le dépôt n’est pas rendu dans les temps, la loi prévoit une majoration automatique de 10 % du loyer mensuel hors charges par mois de retard entamé. Cette règle s’applique de manière stricte, sauf si le locataire n’a pas communiqué sa nouvelle adresse. En 2025, les juridictions rappellent systématiquement que cette majoration est un droit, non une option, et qu’elle vise à éviter les abus dans les retenues injustifiées.
Dépôt de garantie ≠ caution : éviter l’erreur de vocabulaire qui crée des conflits
Le dépôt de garantie est une somme d’argent, versée au bail, pour sécuriser la restitution du bien immobilier en bon état. Il ne doit pas être confondu avec la caution, qui désigne une personne (le garant) s’engageant à payer en cas de défaut du locataire. Ces deux réalités juridiques ne répondent pas aux mêmes logiques et ne produisent pas les mêmes effets. En pratique, confondre les deux conduit parfois à des malentendus sur les responsabilités financières.
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Le dépôt de garantie ne peut jamais servir à régler le dernier mois de loyer. Un locataire qui cesse de payer en se disant “le bailleur n’a qu’à prendre sur le dépôt” se met en tort. Le propriétaire peut refuser la quittance, déduire les sommes dues et engager une procédure de recouvrement. Dans les baux meublés, le dépôt peut atteindre deux mois de loyer, tandis que dans les baux vides, il est limité à un mois. En bail mobilité, il est même interdit d’exiger un dépôt de garantie.
Délai légal de restitution : 1 mois ou 2 mois selon l’état des lieux
Le délai de restitution est fixé par l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989. Il commence le jour de la remise des clés, qu’elle soit faite en main propre contre reçu ou par courrier recommandé. Lorsque l’état des lieux de sortie est conforme à celui d’entrée, la restitution doit intervenir dans le mois. En cas de dégradations, d’impayés ou d’écarts justifiés, le bailleur dispose de deux mois pour motiver les retenues et apporter les preuves nécessaires.
Le point de départ du délai est capital : beaucoup de contentieux naissent d’une différence d’interprétation. C’est la remise des clés qui marque la fin du bail, et non la date du déménagement. Le propriétaire doit alors rembourser le dépôt, déduction faite des retenues justifiées, dans le délai applicable. S’il ne le fait pas, la pénalité commence à courir automatiquement.
Cas des copropriétés : retenue maximale de 20 %
Lorsque les charges sont appelées sur provisions avec régularisation annuelle, le bailleur peut conserver jusqu’à 20 % du dépôt de garantie en attendant l’approbation des comptes. Cette retenue doit être justifiée par la comptabilité de la copropriété, et le solde doit être restitué dans le mois suivant l’assemblée générale. Au-delà, la pénalité de 10 % par mois s’applique sur le reliquat.
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Cette exception vise à éviter de fausses régularisations, par exemple en cas d’augmentation des charges de chauffage collectif ou de dépenses imprévues. Toutefois, les tribunaux sanctionnent les bailleurs retenant plus que 20 % ou ne justifiant pas précisément la somme conservée.
Exemples clairs pour comprendre le fonctionnement des délais
Exemple 1 : les clés sont remises le 10 avril. L’état des lieux est conforme. Le délai court jusqu’au 10 mai. Si la restitution intervient le 25 mai, le bailleur est en retard d’un mois entamé et doit la majoration correspondante. Cela vaut même si le retard n’est que de quelques jours : un mois entamé = un mois complet.
Exemple 2 : les clés sont remises le 5 février et l’état des lieux révèle des dégradations. Le bailleur peut restituer jusqu’au 5 avril. Les justificatifs doivent être précis : devis, factures, constats, photos comparatives. À défaut, la retenue est contestable et peut être annulée.
Exemple 3 : en copropriété, 20 % sont retenus jusqu’à l’approbation des comptes. Si l’assemblée a lieu le 10 septembre, le solde doit être rendu au plus tard le 10 octobre. Un versement au-delà déclenche la pénalité sur la somme restante.
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Retenues autorisées : ce que le bailleur peut légalement déduire
Le dépôt de garantie peut couvrir uniquement les sommes réellement dues : loyers ou charges impayés, réparations locatives, dégradations du logement, frais de nettoyage exceptionnel si l’état est manifestement différent de l’entrée. Ces retenues doivent être justifiées par des éléments probants : devis, factures, constats, photos comparables entre l’entrée et la sortie. Sans preuves, la retenue est abusive.
La vétusté ne peut jamais être imputée au locataire. L’usure normale liée au temps, par exemple une peinture ternie ou un joint jauni, ne justifie aucune retenue. Une grille de vétusté, si elle est annexée au bail, permet d’évaluer objectivement la durée de vie des équipements. À défaut de grille, la jurisprudence impose au bailleur de démontrer que le dommage excède l’usure normale.
En copropriété, retenir plus de 20 % du dépôt ou conserver cette somme au-delà de l’approbation des comptes expose le bailleur à la pénalité légale. Les juges annulent régulièrement les retenues excessives, notamment celles portant sur des travaux disproportionnés ou non prouvés.
Pénalité de 10 % par mois entamé : une sanction automatique
La pénalité prévue par la loi est simple : 10 % du loyer mensuel hors charges par mois de retard entamé. Le calcul s’applique dès le premier jour suivant la fin du délai légal. Ce mécanisme vise à éviter les pratiques consistant à retarder volontairement la restitution, ou à “gagner du temps” sous prétexte d’attendre des devis.
La forme de calcul tient en une formule : Pénalité = (loyer hors charges × 10 %) × nombre de mois de retard entamés. Cette majoration s’ajoute au montant du dépôt à restituer, déduction faite des retenues justifiées. Elle cesse de courir uniquement lorsque le bailleur a intégralement payé ce qu’il doit.
Deux exceptions importantes : la pénalité ne s’applique pas si le locataire n’a pas fourni sa nouvelle adresse lors de la remise des clés ; elle ne s’applique pas non plus si le bailleur restitue une partie du dépôt dans les délais (la majoration ne porte alors que sur le reliquat).
Procédure en cas de dépôt non restitué : les étapes efficaces
En cas de non-restitution du dépôt de garantie, la première étape consiste à relancer courtoisement le bailleur. Un simple email rappelant la date de remise des clés, le délai légal et le montant à restituer suffit souvent. Cette relance doit mentionner votre nouvelle adresse et votre RIB, éléments indispensables pour déclencher le paiement.
En l’absence de réponse, il faut envoyer une mise en demeure par courrier recommandé avec avis de réception. Ce courrier doit rappeler la base légale, le montant dû, la pénalité déjà acquise et le délai que vous laissez (en général huit jours). La mise en demeure marque un tournant : elle constitue une preuve en cas de litige et montre que vous faites valoir vos droits.
Depuis le 1ᵉʳ octobre 2023, toute demande inférieure ou égale à 5 000 € nécessite une tentative préalable de règlement amiable : conciliation ou médiation. Le conciliateur de justice et la Commission Départementale de Conciliation (CDC) sont les organismes compétents en matière de litiges locatifs. Le procès-verbal délivré à l’issue de cet échange permettra, en cas d’échec, de saisir le juge.
Saisir le juge des contentieux de la protection : quand et comment ?
La saisine du juge intervient si le bailleur ne restitue toujours pas la somme due malgré les démarches amiables. Vous disposez d’un délai de trois ans pour agir. Le juge des contentieux de la protection, rattaché au tribunal judiciaire du lieu du logement, est compétent pour trancher ce litige. Selon le montant en jeu, vous pouvez saisir le juge par requête simplifiée ou par assignation.
Un dossier solide maximise vos chances d’obtenir gain de cause : bail, états des lieux, preuve de remise des clés, échanges, mise en demeure, calcul précis de la pénalité et relevés bancaires. En copropriété, ajoutez les pièces justifiant la retenue de 20 % et la date d’approbation des comptes.
Les juges appliquent strictement la loi : une retenue non justifiée est annulée ; un retard inexpliqué est sanctionné. Les condamnations incluent systématiquement le dépôt dû, les pénalités, les intérêts et parfois des dommages-intérêts si le retard a causé un préjudice particulier.
Exemples de calcul pour visualiser clairement les pénalités
Cas 1 : état des lieux conforme, un mois et dix jours de retard
Loyer hors charges : 700 €. Dépôt : 700 €. Délai légal : 10 mai. Restitution le 20 juin = 2 mois entamés. Pénalité : 700 × 10 % × 2 = 140 €. Total dû : 840 €.
Cas 2 : état des lieux non conforme, retenues justifiées
Loyer hors charges : 600 €. Dépôt : 800 €. Délai légal : 5 avril. Retard : 2 mois entamés. Pénalité : 600 × 10 % × 2 = 120 €. Retenues : 150 €. Total dû : 770 €.
Cas 3 : copropriété, retenue de 20 % puis solde en retard
Loyer hors charges : 750 €. Dépôt : 900 €. Retenue légale : 180 €. Solde restitué 2 mois après le délai = pénalité sur le solde : 150 €. Total dû : 330 €.
FAQ : les réponses aux questions les plus fréquentes
Quand commence le délai ? Le jour exact de la remise des clés.
La pénalité s’applique-t-elle si je n’ai pas donné mon adresse ? Non, c’est une exception prévue par la loi.
Le bailleur peut-il garder tout le dépôt pour les charges ? Non, maximum 20 % en copropriété, avec justificatifs.
Peut-on retenir pour de la peinture vieillie ? Non, c’est de la vétusté.
Dois-je payer le dernier loyer ? Oui, le dépôt ne remplace jamais un loyer.
