Une panne de chauffage ou d’eau chaude ne se mesure pas en « jours acceptables » : en droit locatif français, ces équipements relèvent de la décence du logement. Autrement dit, le bailleur doit agir sans délai, surtout en période froide, en organisant à minima une solution provisoire puis la réparation. Côté locataire, des recours gradués existent (mise en demeure, référé, indemnisation/réduction de loyer). Ci-dessous, la réponse courte, puis le cadre légal qui fonde vos droits.
En clair :
Pas de délai légal “X jours” : l’accès au chauffage et à l’eau chaude fait partie des critères de décence du logement. Le bailleur doit faire rétablir sans délai un service normal, a fortiori en période froide.
À lire : Procuration pour état des lieux : comment faire (modèle Word/PDF)
J0–J2 : signaler + dépanner
Informer le bailleur/gestionnaire par écrit (mail + SMS pour l’horodatage). Joindre photos/vidéos, marque/modèle de l’appareil, symptômes, et proposer des plages d’intervention. Le bailleur organise diagnostic + intervention et, si le rétablissement n’est pas immédiat, fournit une solution provisoire (radiateurs d’appoint, chauffe-eau d’appoint…).
J3–J7 : mise en demeure + proposition d’indemnisation
Si le service n’est pas rétabli : mise en demeure LRAR de réparer et de mettre en place un dispositif temporaire, avec délai précis (48–72h) et proposition chiffrée de réduction de loyer au prorata de la perte de jouissance.
Au-delà : référé
En l’absence d’action efficace : saisine du juge des référés pour injonction d’exécuter sous astreinte, réduction de loyer et dommages-intérêts.
À ne pas faire : ne pas cesser de payer le loyer unilatéralement. Privilégier la réduction/indemnisation formalisée par écrit (ou ordonnée par le juge).
Le cadre légal : chauffage = décence du logement
Le bailleur est tenu de délivrer un logement décent et d’en assurer le maintien en état d’usage et de réparation. À ce titre, les équipements indispensables à un usage normal — dont le système de chauffage et la production d’eau chaude — doivent fonctionner et être sécurisés. Le locataire assure l’entretien courant et les menues réparations prévues au bail.
Textes de référence :
Loi du 6 juillet 1989, art. 6 : obligation de délivrer un logement décent et d’en assurer la jouissance paisible.
Décret “décence” : le logement doit permettre de maintenir une température intérieure normale et disposer d’installations de chauffage et d’eau chaude adaptées et sûres.
Conséquences pratiques :
Délai d’intervention : il doit être immédiat/rapide, surtout en hiver.
Répartition des charges : grosses réparations = bailleur ; entretien courant = locataire.
Indemnisation : absence prolongée = réduction de loyer + dommages-intérêts.
Qui doit intervenir ? (répartition des responsabilités)
Chauffage individuel
Bailleur : pannes structurelles, grosses réparations, vétusté, mise en conformité, remplacement de l’appareil ; doit fournir une solution provisoire si réparation non immédiate.
À lire : Réglementation de la porte d’entrée en location : obligations, sécurité, réparations
Locataire : entretien courant (entretien annuel chaudière, purge, petites pièces). L’absence d’entretien peut modifier la répartition des coûts, mais n’exonère jamais le bailleur de rétablir le service.
Chauffage collectif / réseau urbain
Bailleur : seul interlocuteur du locataire ; il alerte syndic/exploitant et informe sur les délais.
Syndic/exploitant : organise diagnostic et réparation.
Indemnisation : demandes adressées au bailleur, qui se retourne ensuite contre le syndic si nécessaire.
Coupure pour impayés d’énergie
Si le contrat est au nom du locataire, la coupure relève de sa responsabilité (avec protection hivernale). Les coupures collectives relèvent du syndic.
Délais « acceptables » : jalons opérationnels
J0–J2 : diagnostic + solution provisoire
Mise en place de radiateurs d’appoint, accès à une douche, convocation SAV, mail d’information au locataire.
J3–J7 : réparation planifiée
Confirmation écrite : date d’intervention, pièces commandées, maintien des solutions provisoires.
Après J7 : mise en demeure
LRAR demandant réparation sous 48–72h, réduction de loyer, remboursement de frais.
Cas de force majeure
Quand la livraison de pièces est longue : renforcer les solutions provisoires et l’indemnisation.
Hiver vs hors hiver
Hiver : tolérance quasi nulle au-delà de quelques jours.
Hors hiver : solutions provisoires parfois acceptables plus longtemps si confort raisonnable.
Solutions provisoires & bonnes pratiques bailleur
Prévoir des radiateurs à coupure thermique (1 000 à 2 000 W), éviter multiprises, proposer un ballon d’eau chaude temporaire ou un accès à des douches. Fournir un bon de prêt. Rembourser la surconsommation d’énergie sur justificatifs.
Informer par écrit dès J0 ; confirmer les délais ; prioriser les foyers fragiles ; tout tracer (devis, photos, échanges).
Indemnisation : réduction de loyer & dommages-intérêts
Calcul simple
Base : loyer hors charges.
Pro rata : jours sans service / jours du mois.
Coefficient d’impact :
1,0 = absence totale sans appoint ;
0,5 = appoint efficace ;
0,25 = panne partielle courte.
Formule : Réduction = Loyer HC × Pro rata × Coefficient.
Exemples
Loyer HC 1 000 €, panne 5 jours sans appoint → 166,67 €.
Même panne avec appoint → 83,33 €.
Eau chaude 3 jours → 25 €.
En chauffage collectif : réduction sur loyer HC + remboursement des frais d’appoint.
Remboursement de frais
Électricité des radiateurs, douches extérieures, achats temporaires… sur justificatifs.
Dommages-intérêts
Pour préjudices distincts : relogement, santé, trouble anormal, examens manqués.
Barèmes indicatifs
Panne < 48h : 5–10 % du loyer au prorata.
3–7 jours : 30–60 %.
Panne prolongée : jusqu’à 100 % + dommages-intérêts.
Recours du locataire : procédure graduée
1. Signalement écrit immédiat
Description, photos, dates, foyers vulnérables, demande d’intervention urgente + solution provisoire.
2. Mise en demeure LRAR
Délai fixé (48–72h en hiver). Demande d’indemnisation.
3. Alerte services publics
Constat SCHS/ARS ; appui ADIL pour chiffrer réduction et préparer dossier.
4. Référé
Injonction d’exécuter, réduction de loyer, provision dommages-intérêts.
Option : médiation / CDC
Possible si volonté amiable. La consignation du loyer doit être encadrée.
Cas particuliers
Entretien non fait par le locataire
Bailleur intervient quand même ; imputation partielle possible selon rapport technique.
Copropriété
Bailleur contacte le syndic, qui organise travaux urgents. Bailleur informe et indemnise au besoin.
Travaux structurels
Conduits, VMC, ventilation : obligations du bailleur pour sécurité ; les « rustines » ne suffisent pas.
Logement énergivore
Peut basculer en non-décence énergétique ; travaux obligatoires, réduction de loyer et risques d’injonction.
FAQ
Y a-t-il un délai légal précis sans chauffage ?
Non. L’obligation est un rétablissement sans délai, avec urgence renforcée en hiver.
Le bailleur doit-il fournir des radiateurs d’appoint ?
Oui, si la remise en service n’est pas immédiate.
Puis-je suspendre ou consigner le loyer ?
Pas unilatéralement. Consignation possible mais encadrée ; réduction sur décision ou accord.
Quelle indemnisation puis-je demander ?
Réduction de loyer + remboursement de frais + éventuels dommages-intérêts.
Qui paie si la panne vient d’un défaut d’entretien ?
Les coûts imputables au défaut d’entretien peuvent revenir au locataire ; vétusté = bailleur.
Chauffage collectif en panne : que faire ?
Informer le bailleur ; syndic gère réparation ; bailleur indemnise si besoin.
Sans eau chaude : mêmes règles ?
Oui : décence, intervention immédiate, solutions provisoires, réduction si retard.
En hiver, les délais changent-ils ?
Pas de délai chiffré, mais urgence renforcée et risques accrus de non-décence.
