Nouveau projet de loi ELAN sur le logement : décevant !

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Son nom est prometteur, « Loi ELAN » ; ses propositions beaucoup moins. La politique du logement présentée par le gouvernement le 4 avril 2018 est décevante pour les bailleurs qui attendaient des gestes forts, et notamment une reconnaissance de leur contribution à la vie économique du pays.

 

Appelé à être discuté au Parlement en juin prochain, le projet de loi ELAN (Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique) ne va pas bouleverser le secteur du logement. Dommage. Une occasion perdue pour les Pouvoirs Publics de revaloriser le statut de bailleur privé et par là même de booster l’envie d’investir des particuliers.

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Car l’augmentation tant souhaitée du nombre de logements à louer en France passe aussi par une reconnaissance du tribut véritablement « citoyen » que représente la gestion privée de biens immobiliers locatifs, dans un contexte législatif déséquilibré où les locataires sont privilégiés. Les demandes répétées des associations de bailleurs pour l’instauration d’un véritable statut n’auront donc pas eu d’écho. Nous vous parlions l’an dernier déjà du rôle économique des bailleurs,  ainsi que des mesures urgentes explicitées dans les doléances de l’UNPI.

Alors, quelles sont les mesures proposées dans le projet de loi ELAN liées aux bailleurs ?

Notons que ce projet contient 64 articles au total et que le leitmotiv est de « faciliter la construction et l’accès au logement ».

L’instauration d’un bail mobilité

Nous l’avions évoqué fin 2017 lors de sa première présentation en Conseil des Ministres. Le « bail mobilité » est un contrat de location sans dépôt de garantie et pouvant s’étendre sur une durée comprise entre un à dix mois, non renouvelable. L’idée est d’aider les personnes souhaitant une location (servant de résidence principale) de courte durée à se loger. Élément très important pour les bailleurs : aucun dépôt de garantie ne pourra être exigé auprès des locataires. En contrepartie, l’Etat s’engage à se porter garant. Une caution déjà existante (garantie Visale) qui vient d’être modifiée et qui sera étendue à ces baux de courte durée.

La renaissance de l’encadrement des loyers est bien réelle..

Un petit tour et puis s’en va… et puis pourrait revenir… Alors que beaucoup de bailleurs avaient crié victoire lors de l’annulation des encadrements de loyers à Lille puis à Paris, la mesure risque de revenir, et dans de nombreuses autres villes. Nous l’avions annoncé dans une actualité récente dédiée à l’annulation de l’encadrement des loyers à Paris, notant que cette annulation avait plus découlé d’un vice de forme que d’une volonté des Pouvoirs Publics de revenir dessus…

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L’article 48 de la loi propose ainsi une « mise en œuvre du dispositif d’encadrement du niveau des loyers par arrêté préfectoral, sur les territoires compris dans les zones dans lesquelles la tension locative est la plus forte, à titre expérimental et à la demande des établissements publics de coopération intercommunale ou des collectivités compétents en matière d’habitat ». Les municipalités qui souhaitent mettre en place un encadrement des loyers pourront donc le faire.

Les dépôts de garantie transférés à la CDC.

L’idée avait été énoncée en mai 2017 par Emmanuelle Cosse (alors ministre du logement) et nous l’avions traitée dans une actualité courant 2017 : l’idée était de créer un fonds unique de centralisation des dépôts de garantie (public) qui ne seraient donc plus conservés par vous, les propriétaires bailleurs.

Centraliser les dépôts de garantie permet d’en utiliser une partie au profit de politiques publiques liées, notamment, à la solvabilisation des locataires. En effet, l’objectif de ce transfert avait été clairement décrit dans le rapport remis à la ministre : minimiser les litiges entre les propriétaires et les locataires et permettre le financement de la transition énergétique et la politique du logement.

Le projet de loi Elan ne mentionne pas, en fait, cette idée, mais le rapporteur indiquait qu’il était possible que la mesure intègre la nouvelle loi logement par voie d’amendement. Mesure explosive, d’après les professionnels de l’immobilier et les associations de bailleurs ! Ces dernières avaient déjà rappelé que les litiges ne concernaient que 4 % des baux et qu’il apparaissait clairement que le véritable objectif était, pour les Pouvoirs Publics, de prendre le contrôle de fonds privés, une nouvelle fois dans le domaine immobilier !

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Un tel dispositif supprimerait une véritable garantie pour le bailleur d’être remboursé rapidement de dégradations ou d’un dernier loyer impayé (sujet important que nous traitons dans notre dossier : « Mon locataire ne paie pas son loyer, que faire ? »), puisque nombre de locataires partent en estimant que le dépôt de garantie paie le dernier loyer… Les contentieux seraient cette fois nombreux entre les bailleurs et l’organisme public qui, compte tenu du rapport déséquilibré entre locataires et bailleurs, se positionnerait la plupart du temps très certainement en faveur des locataires, souvent « victimisés » !

Encore une fois, donc, les bailleurs ne sont pas assez respectés et ce projet de loi nous semble très décevant…

 

 

Patrick Chappey – © 2018 Gererseul.com

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